Le patron du constructeur aéronautique italien Finmeccanica a été arrêté mardi pour corruption dans une affaire de vente d'hélicoptères à l'Inde, plongeant dans la tourmente l'un des groupes-phare du pays et ouvrant un nouveau dossier épineux pour le gouvernement en pleine campagne électorale. L'enquête, en cours depuis plusieurs mois, porte sur la livraison en 2010 par sa filiale AgustaWestland de 12 hélicoptères au gouvernement indien. Elle aurait donné lieu en coulisse au versement d'un pot-de-vin de 51 millions d'euros, selon des sources judiciaires citées par la presse italienne. Giuseppe Orsi, qui combine les charges de président et d'administrateur délégué de Finmeccanica, faisait l'objet d'une enquête depuis avril 2012. Il était à l'époque de la transaction administrateur délégué de AgustaWestland. La presse italienne avait fait état à l'automne 2012 de rumeurs de départ forcé de M. Orsi, alors que l'intéressé s'y serait pour sa part opposé. Plusieurs noms de successeurs potentiels avaient déjà circulé. L'arrestation de M. Orsi aurait été décidée par le juge en charge de l'enquête au tribunal de Busto Arsizio, près de Milan, en raison de risques de récidive et de dissimulation des preuves, rapporte l'agence Radiocor. Son prédécesseur au poste de président de Finmeccanica, Pier Francesco Guarguaglini, avait déjà dû démissionner en décembre 2011 dans la foulée d'un scandale de corruption. "Face aux dispositions judiciaires de ce jour concernant le président et administrateur délégué de Finmeccanica et l'administrateur délégué de sa filiale AgustaWestland, Finmeccanica confirme qu'elle poursuit normalement ses activités de gestion ordinaire et ses projets", a pour sa part réagi l'entreprise italienne dans un communiqué. "Finmeccanica exprime en outre sa solidarité à l'encontre de son président et administrateur délégué et espère que toute la lumière sera faite rapidement, en renouvelant sa confiance envers le travail de la justice", indique le groupe sans livrer plus de détails. Côté indien, les autorités ont annoncé mardi l'ouverture d'une enquête du CBI (Bureau central d'enquête)", selon un porte-parole du ministère de la Défense. A la Bourse de Milan, le cours du groupe a accusé le coup. Son titre chutait de plus de 8% en milieu de journée. Ce nouveau développement tombe mal pour le groupe, l'un des fleurons technologiques du pays et l'un de ses principaux employeurs avec environ 70.000 employés au niveau mondial, alors qu'il se trouve en pleine phase de restructuration pour faire face à ses difficultés financières. Mais il tombe sans doute encore plus mal pour son principal actionnaire, l'Etat italien, propriétaire de 30,2% de son capital et sous pression depuis plusieurs mois déjà pour agir dans ce dossier. Il vient s'ajouter au vaste scandale financier qui déstabilise depuis trois semaines la 3ème banque du pays, Banca Monte dei Paschi di Siena (BMPS), le tout encore amplifié par l'actuelle campagne électorale pour les législatives des 24-25 février. Les réactions politiques ne se sont d'ailleurs pas fait attendre en Italie, et le gouvernement sortant de Mario Monti s'est vu accuser par un responsable communiste, Paolo Ferrero, de s'être conduit dans le dossier Finmeccanica "comme les trois petits singes, ne pas voir, ne pas entendre et ne rien dire". "Il y a un problème dans la gouvernance de Finmeccanica et nous le résoudrons au plus vite", a admis M. Monti, interrogé mardi matin par la Rai. Ce rebondissement intervient à peine quelques jours après l'ouverture par le Parquet de Milan d'une enquête à l'encontre du patron du géant énergétique italien ENI, Paolo Scaroni, pour une affaire de corruption en Algérie. Cette annonce est "clairement négative" pour Finmeccanica, explique l'analyste de Mediobanca Massimo Vecchio dans une note: "Un nouveau PDG procéderait à des dépréciations et prendrait du temps pour revoir la stratégie (faisant probablement échouer les cessions prévues)", note-t-il en allusion au projet de vente controversé de sa filiale de turbines Ansaldo Energia et d'autres actifs. En outre, "la crédibilité de Finmeccanica pour sa participation à de futurs appels d'offre à l'étranger a été atteinte", souligne-t-il.