Un appel pour la modification de la loi Morin de 2010 sur l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français dans le Sahara algérien et en Polynésie, a été lancé jeudi par l'Association des vétérans des essais nucléaires (AVEN) qui estime que cette loi "n'indemnise pratiquement personne". Dans une pétition nationale qui sera remise prochainement au chef de l'Exécutif français, l'association assure que l'objectif recherché est que "toute personne souffrant d'une maladie radio-induite résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français, bénéficie d'une présomption de causalité et d'imputabilité stricte". Les auteurs de l'appel, ouvert à toute victime ou organisation se sentant concernée, souhaitent la "disparition" de la mention figurant à l'article 4 de la loi et 7 de son décret d'application, qui stipule que cette indemnisation est possible "à moins qu'au regard de la nature de la maladie et des conditions de son exposition, le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable". Ils regrettent que la loi du 5 janvier 2010, relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, présente la caractéristique d'être une loi d'indemnisation qui "n'indemnise pratiquement personne". "En effet, les articles 4 de la loi et 7 de son décret d'application, balaient, d'un revers de manche, la notion de présomption de causalité, pourtant voulue par les parlementaires, et ont également permis au comité d'indemnisation (CIVEN) de remettre en vigueur la valeur dosimétrique, sous prétexte de définition de la nature de l'exposition", ont regretté les auteurs de la pétition. Selon eux, cette méthode de calcul imaginée par le CIVEN permet à celui-ci de "rejeter 99% des demandes d'indemnisations et crée des injustices flagrantes". Selon le président de l'Aven, Jean-Luc Sans, une audience sera demandée au Premier ministre français, Jean-Marc Ayrault, à qui la pétition sera remise. "Une action de contestation devant l'Assemblée nationale n'est pas à écarter en septembre prochain", a-t-il indiqué. Dans un récent entretien accordé à l'APS, M. Sans a affirmé que la loi Morin devait être "impérativement" modifiée tant que la présomption de causalité stricte n'est pas appliquée. Trente-deux (32) dossiers algériens de reconnaissance et d'indemnisation des victimes des essais nucléaires français dans le Sahara ont été rejetés en décembre dernier par la commission ad-hoc mise sur pied à la faveur de la loi Morin, car jugés "incompatibles" avec cette loi. Ils ont été refusés au motif que les pathologies déclarées "ne rentrent pas dans le cadre de la loi". Le 13 février 1960, la France faisait exploser sa première bombe atomique "Gerboise bleue" dans le ciel de Reggane, en plein Sahara algérien, un désastre écologique et humain qui, 53 ans après, continue de provoquer des maladies dont des cancers radio-induits. A ce jour, aucune des victimes civiles de ces essais, suivis par d'autres jusqu'à 1966, n'a été reconnue comme telle.