Pour la presse anglaise unanime, Manchester United a été éliminé par un seul homme, l'arbitre turc Cuneyt Cakir, coupable d'avoir exclu le Portugais Nani en seconde période, et non par le Real Madrid, pourtant vainqueur 2 à 1 mardi en huitièmes de finale de la Ligue des champions. "Volés" pour le Dail Mail, "Injustice" pour le Manchester Evening News, "Brisés" pour The Sun, "Anéantis" pour le Daily Telegraph: les tabloïds et la presse sérieuse s'accordent tous sur le diagnostic, comme si aucune équipe n'avait jamais réussi à tenir un résultat - ManU menait 1 à 0 au moment du carton rouge - à 10 contre 11 pendant une demi-heure à domicile. Les titreurs rivalisent de jeux de mots pour résumer la soirée. Les "Red Devils" ont "vu rouge" pour l'Independent, alors que le Daily Express parle de "vrai (real) mascarade". Les quotidiens s'appuient sur les déclarations de José Mourinho qui a lui-même estimé que "la meilleure équipe avait perdu". Le Times, méfiant, croit tout de même voir dans cette démonstration de fair play du Portugais une opération de séduction à l'égard d'un club qu'il aimerait bien entraîner un jour. Les commentateurs ne nient pas l'indiscutable pied levé de Nani, mais jugent la sanction disproportionnée. "Quelle bourde", s'exclame le journal local, alors que le Times estime que le geste de l'ailier valait "au plus un carton jaune". Le Daily Mail jure que le joueur "ne regardait que la balle" et l'Independent, qui jouit pourtant d'une réputation de modération, évoque une "attaque de l'arbitre contre l'ordre naturel du jeu" qui aurait "défait les énormes réserves de volonté de Manchester United". Concert de protestations Une voix discordante toutefois dans ce concert de protestations, celle de l'ancien capitaine de Manchester United Roy Keane, selon lequel l'arbitre "a pris la bonne décision". "C'était du jeu dangereux. Il faut faire attention aux autres joueurs sur le terrain", estime dans le Sun l'ex-milieu de terrain irlandais, réputé pour son franc-parler. Cuneyt Cakir n'était pas un inconnu pour les commentateurs anglais, à qui il rappelait même de mauvais souvenirs. Lors de la seule année 2012, l'arbitre turc avait sorti le carton rouge dans trois matches impliquant des clubs anglais: Barcelone-Chelsea en demi-finale retour de la Ligue des champions (exclusion de John Terry), Chelsea-Corinthians en finale du Mondial des clubs (Gary Cahill) et Angleterre-Ukraine en qualification pour le Mondial-2014 (Steven Gerrard). Après cette dernière rencontre, le capitaine de Liverpool avait déclaré que "alors qu'il n'y avait pas encore eu un seul mauvais tacle, l'arbitre avait déjà sorti sept cartons jaunes". Enfin tous les journaux soulignent le désarroi et la colère supposés de l'entraîneur Alex Ferguson, "pas en état" de venir commenter le match en conférence de presse, sans rappeler que l'Ecossais n'en est pas à son coup d'essai. Il ne s'était par exemple pas présenté non plus devant les journalistes après le derby City-United cet automne, pourtant gagné par les siens.