Nicolas Maduro, un ancien chauffeur d'autobus venu à la politique par le syndicalisme, est à 50 ans un vétéran du chavisme qui a pris en main la diplomatie du Venezuela avant d'être propulsé vice-président, puis dauphin officiel par un Hugo Chavez à la santé déclinante. Cet homme à la haute stature arborant une épaisse moustache sombre a prêté serment vendredi soir comme président par intérim du pays. Il aura pour charge d'organiser une élection présidentielle dans les 30 jours, à laquelle il sera à n'en pas douter candidat. Mardi, c'est ce fidèle parmi les fidèles qui, la gorge serrée, a annoncé le décès du président Chavez. "C'est l'un des jeunes dirigeants ayant les meilleures capacités" pour diriger le pays "avec sa main ferme, avec sa vision, avec son coeur d'homme du peuple, avec son talent avec les gens (...), avec la reconnaissance internationale qu'il s'est acquise", avait annoncé Hugo Chavez le 11 décembre en le désignant comme son héritier politique avant de s'envoler pour Cuba pour une quatrième opération du cancer dont il ne s'est jamais remis. Hugo Chavez avait alors demandé aux Vénézuéliens de faire de M. Maduro leur président s'il n'était un jour plus en mesure d'assumer ses fonctions. Il avait loué en Maduro "un révolutionnaire à part entière", "un homme plein d'expérience malgré sa jeunesse". Ministre des Affaires étrangères depuis 2006, Nicolas Maduro a été nommé vice-président par M. Chavez dans la foulée de sa victoire à la présidentielle du 7 octobre 2012. "Regardez où va Nicolas, le chauffeur de bus Nicolas. Il était chauffeur de bus, et comme ils se sont moqués de lui!", s'était exclamé M. Chavez en le nommant vice-président. Auparavant, cet ancien dirigeant du syndicat du métro de Caracas avait brièvement été président de l'Assemblée nationale (2005-2006). En 1999, il avait décroché son premier mandat de député, sous la bannière du Mouvement 5e République, fondé par Hugo Chavez, arrivé au pouvoir la même année. Les destins des deux hommes s'étaient déjà croisés au sein du Mouvement révolutionnaire bolivarien 200 (MBR-200), également créé par M. Chavez, à la tête duquel il avait mené son coup d'Etat manqué contre le président Carlos Andres Perez en 1992. Et dès le début des allers-retours médicaux de Hugo Chavez à Cuba, il avait été l'un de ses visiteurs les plus assidus, avec le président de l'Assemblée nationale Diosdado Cabello, numéro deux de l'exécutif. La haute silhouette de ce membre de l'aile modérée du chavisme est également devenue familière dans les rendez-vous internationaux depuis qu'il a remplacé à plusieurs reprises un Chavez affaibli lors de grands sommets. Des analystes soulignent sa capacité à naviguer parmi les différentes tendances du chavisme, son caractère conciliant et sa grande capacité à négocier. Mais depuis qu'il a commencé à exercer de fait le pouvoir, en l'absence prolongée du président Chavez, il a durci le ton à l'égard de l'opposition et des "ennemis de l'intérieur et de l'extérieur", reprenant à son compte la rhétorique chaviste. Sa cible favorite demeure le principal représentant de l'opposition, le gouverneur Henrique Capriles, qualifié de "prince de la bourgeoisie parasite". La prochaine présidentielle devrait se résumer à un duel entre les deux hommes. "Il est évident que Maduro veut consolider son pouvoir". Il a adopté "une stratégie de radicalisation et d'intimidation visant des rivaux internes et externes", estimait récemment l'analyste politique Luis Vicente Leon. A l'instar de son mentor, il a également multiplié les apparitions publiques et les discours fleuve, s'imposant comme le nouveau visage de l'exécutif. Pour le politologue et professeur d'Université Ricardo Sucre, M. Maduro "est le choix des (dirigeants cubains Fidel et Raul) Castro", très proches de M. Chavez. L'historienne Margarita Lopez Maya souligne pour sa part "la fidélité" du "meilleur porte-parole" international du gouvernement Chavez, dont il a parfaitement adopté le discours "anti-impérialiste" et le soutien à des régimes comme l'Iran, la Libye ou la Syrie. Elevé dans le quartier de classe moyenne de Los Chaguaramos, à Caracas, où il a milité dès le lycée, Nicolas Maduro a également suivi une année de sciences politiques à Cuba. Il est marié à Cilia Flores, autre figure du chavisme et procureur général de la République.