L'influence des conflits politiques sur l'écriture romanesque et poétique a été analysée mardi à Alger par deux auteurs invités à la 6ème édition du Festival international de la littérature et du livre de jeunesse (Feliv), qui se tient depuis le 13 juin. Le poète algérien Khaled Ben Saleh et le romancier irakien Muhsin Al Ramli ont évoqué l'impact de la violence des guerres et des conflits armés sur leurs œuvres respectives et leur influence déterminante sur l'orientation esthétique de leur écriture. Auteur de deux recueils de poésie aux éditions algériennes Ikhtilaf, Khaled Ben Saleh a insisté sur la dimension "humaniste" de sa poésie, surtout lorsque celle-ci traite des conséquences -sur l'individu et la société- de la violence terroriste des années 1990 et les "crimes gratuits et incroyablement barbares" qu'elle a engendrés. Pour lui, cette dimension s'exprime dans l'importance accordée au "rêve et à l'irréel" dans son écriture, seule capable, selon lui, de restituer fidèlement la "mémoire individuelle" de cette période douloureuse. "Il ne s'agit pas de glorifier la tristesse ou la mort", explique-t-il, mais de réussir à "communiquer la marque inconsciente" que ces années ont imprimée dans l'esprit des Algériens, dira-t-il, en évoquant le ton "élégiaque" de son recueil de poésie "Miata wa ichroun mitran mina el bayt" (A cent vingt mètres de la maison, 2012). Muhsin Al Ramli a, pour sa part, parlé de sa propre écriture romanesque et de celle des auteurs de son pays, les liant à "l'histoire millénaire de l'Irak qui n'a jamais connu la paix, ne serait-ce que dix années consécutives" ainsi qu'il l'a relevé. Pour l'auteur de "Hadaik ar-raïs" (Les jardins du président, 2012) -un roman inspiré par les événements qu'à connus son pays durant les cinquante dernières années- le "véritable" écrivain se doit toujours d'être "du côté des victimes", en se focalisant sur les histoires "simples et personnelles" vécues lors des conflits. Le choix de "défendre les faibles en racontant leurs histoires propres", reste, pour le romancier, une manière de "défendre les valeurs humanistes de la littérature", contrairement au récit journalistique qui lui, "ne parle des victimes de conflits qu'à travers des bilans numériques", dira-t-il. Muhsin Al Ramli évoquera aussi la "nécessité du recul" pour le romancier qui veut aborder les conflits, citant en exemple le nombre important de romans publiés aujourd'hui en Espagne, son pays d'adoption, sur la guerre civile du milieu des années 1930 dans la péninsule ibérique. Quant à l'écrivain syrien Khaled Khalifa et la romancière turque Asli Erdogan, qui étaient attendus à ce Feliv, ils ont finalement annulé leur déplacement en Algérie, en raison de "la situation politique qui prévaut dans leurs pays respectifs", ont expliqué les organisateurs. Le 6e Feliv se poursuivra à Alger, Tizi-Ouzou et Tipasa jusqu'au 22 juin avec des rencontres littéraires, des spectacles de musique et des ateliers pour enfants.