La prise en charge qualitative et l'accompagnement des handicapés au niveau des centres spécialisés, appartenant à des associations, n'est pas une affaire «conjoncturelle de bénévolat», mais celle de professionnels permanents, surtout pour les handicaps lourds, en constante hausse. Les associations d'aide aux handicapés réclament aux pouvoirs publics de dégager des postes budgétaires pour le personnel spécialisé engagé par ces associations. «Les associations ne peuvent pas prendre en charge les salaires des personnels spécialisés chargés d'encadrer les handicapés», nous a indiqué Mme Yahiaoui, responsable psychopédagogique à l'association nationale Aide aux handicapés mentaux. «Nous sommes contre le bénévolat pour les corps professionnels chargés d'encadrer les personnes handicapées», a insisté Mme Yahiaoui. Les psychologues, les orthophonistes, les éducateurs et autres personnels spécialisés assurent l'encadrement des handicapés pris en charge au niveau des centres des associations, mais celles-ci ne disposent pas de moyens financiers suffisants pour assurer leurs salaires qui ne dépassent pas pour la majorité 18 000 DA. Mme Yahiaoui a estimé que les centres créés par les associations doivent bénéficier d'un budget de fonctionnement, octroyé par l'Etat afin de pouvoir assurer la formation des handicapés. L'association nationale Aide aux inadaptés mentaux (AAI), créée en 1974, a œuvré depuis sa création pour assurer un accompagnement de qualité aux personnes handicapées. Face au déficit en matière de prise en charge des handicapés mentaux, d'autres associations ont été créées à travers 38 wilayas avant de se regrouper au sein d'une fédération qui compte actuellement 48 associations qui ont réussi à créer 72 centres, accueillant 5000 handicapés. Pour un accompagnement psychopédagogique des enfants handicapés, l'association a ouvert 10 centres spécialisés en psychopédagogie, formation préprofessionnelle et de formation professionnelle, adaptés pour les différentes tranches d'âge. L'allocation journalière insuffisante «Nous accompagnons les enfants pour leur apprendre même les gestes élémentaires comme l'ouverture d'un robinet, par exemple», a remarqué Mme Yahiaoui, déplorant «le désengagement» de certains parents qui ne font pas d'efforts pour apprendre à leurs enfants à être autonomes. «Certains handicapés, âgés de 18 ans, portent encore des couches», s'est-elle inquiétée, plaidant pour des aides de l'Etat afin de pouvoir contribuer à l'intégration sociale et professionnelle des handicapés. Pour Younès Aiter, membre de l'association, la prise en charge des enfants handicapés nécessite la mobilisation d'une équipe pluridisciplinaire, en plus des autres frais permettant de garantir un encadrement adéquat, d'où la nécessité d'augmenter l'allocation journalière limitée à 313 DA, depuis 2003. La Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés (Cnas) est appelée à réviser à la hausse cette allocation qui ne permet plus de couvrir les charges d'une personne handicapée. Le SNMG a été augmenté à 18 000 DA tandis que l'allocation n'a connu aucun changement, a-t-il déploré, ajoutant que la masse salariale annuelle supportée par l'association, qui emploie un effectif de 250 personnes, est de 26,3 millions DA. Cette masse salariale absorbe une grande partie du budget annuel qui est de 33 millions DA, rendant la gestion financière de l'association difficile. «Nous avons des difficultés financières qui entravent le fonctionnement de l'association», a noté M. Aiter. En obtenant des financements supplémentaires, les associations peuvent assurer notamment le ramassage scolaire des enfants qui n'ont pas de moyen de transport pour rejoindre les centres. Beaucoup d'enfants handicapés sont inactifs en raison de la difficulté de rejoindre ces structures. «Nous avons formulé plusieurs demandes au ministère de la Solidarité, en vain», a-t-il regretté. Ceci étant, l'association a réussi, malgré toutes les difficultés financières, à construire un centre spécialisé. Des appels sont lancés aussi pour la suppression des charges fiscales pour les associations d'aide aux handicapés et l'octroi des autorisations pour les associations productives pour vendre les produits fabriqués par leurs membres. Le rêve de créer une ferme pédagogique pour les handicapés M. Aiter a, par ailleurs, revendiqué l'octroi de cartes aux handicapés, conformément à la réglementation, jamais appliquée en raison de l'absence de textes. En obtenant ces cartes, les handicapés auront droit à la carte Chifa de la sécurité sociale. Les trisomiques, par exemple, ne bénéficient que d'une prise en charge médicale de 80 % alors que leur handicap est lourd. Son association souhaite réaliser une ferme pédagogique devant accueillir les handicapés sans famille. Ce projet, vieux de 25 ans, tarde à voir le jour à cause des difficultés financières. Pourtant, certains enfants handicapés sont exploités par des réseaux mafieux pour vendre la drogue alors qu'ils peuvent être protégés à travers ce genre de centres qui leur apprendra un métier. Leurs produits peuvent être vendus afin de faire fonctionner le centre qui les accueille. Mais, M. Aiter est convaincu que pour aider les handicapés à s'insérer professionnellement et socialement, «il faut une décision politique».