Le quatrième congrès du Conseil national de l'Enseignement supérieur (Cnes), qui s'est tenu le 27 juin, a été sanctionné par le renouvellement du mandat de Abdelmalek Rahmani, ancien secrétaire général, et la mise en place d'un bureau national composé de 9 membres issus de la nouvelle génération de syndicalistes et 6 membres de l'ancienne équipe. Selon M. Rahmani, l'expérience des anciens cadres au niveau de l'organique est nécessaire car elle reflète une volonté d'entamer un virage progressif. Au cours du congrès, la question de la politique universitaire a primé et une évaluation objective de cette problématique a été abordée selon le secrétaire général du Cnes qui estime que le secteur doit faire l'objet d'un débat national profond dans les nombreuses instances représentatives du pays. «Sur les questions liées à la gestion, la gouvernance, la collaboration avec les partenaires sociaux, on reste à la traîne et cela se répercute négativement sur le rang de nos universités. De plus, nous nous interrogeons sur l'absence de dialogue national, de débat au sein de l'APN alors que le système éducatif est corrélé au choix d'une politique. Je pense que l'on a confondu la démocratisation de l'enseignement avec une démarche populiste. Nous ne pouvons plus gérer une telle masse d'étudiants et personne ne veut débattre de cela. Nous souhaitons être désormais associés aux discussions pour pouvoir intervenir en amont de la promulgation d'une loi», a t-il expliqué, ajoutant que cette question fera l'objet d'une attention particulière au cours de son mandat. Aussi, il a jugé que cette démarche analytique ne pourrait se faire sans le concours de la société civile, des partis politiques, car c'est le cœur de la formation et de l'éducation qui doit, selon lui, être revu et corrigé. «La formation professionnelle est à la traîne. Elle est dévalorisée par la société, les adultes qui ne conçoivent pas que tous les métiers aient leur utilité. Tous les parents rêvent d'avoir un fils docteur alors que c'est une utopie. Aussi, comment pense-t-on construire une économie qui absorberait le chômage des jeunes si la formation professionnelle n'est pas à la hauteur», s'est-il interrogé, soulignant également le rôle des parents vis-à-vis de l'échec de leurs enfants. «Un Algérien n'accepte pas que son enfant soit différent. Nous sommes face à un problème sociétal d'autant que les gens pensent pouvoir construire un système éducatif en dehors de ce type de contrainte sociale alors que c'est un facteur qui détermine le système éducatif. C'est pour cela que nous réclamons un débat d'envergure nationale», a-t-il déclaré. La fraude est une conséquence du système éducatif Consulté sur les tricheries qui ont émaillé le baccalauréat, loin de cautionner de tels actes, M. Rahmani l'explique toutefois par une analyse psychosociale. En effet, selon lui, la tricherie qui prend chaque année des proportions des plus alarmantes serait la résultante du système éducatif dans sa globalité et du système d'évaluation en particulier. «L'école est loin d'être le lieu où l'enfant développe sa personnalité, au contraire, il se voit brimé à cause de la question lancinante de l'échec et de la réussite. Je m'explique. Dès sa première année de primaire, un enfant est confronté à des évaluations qui vont le classer parmi les bons ou les mauvais. S'il est en réussite, il suit un développement psychomoteur normal mais s'il échoue, il entamera sa vie d'adolescent avec des complexes qui le poursuivront à l'âge adulte et il risque selon son parcours de compenser ses échecs par la violence. Il faut donc se détourner du système actuel et s'enrichir des expériences des pays nordiques, où l'enfant qui n'est pas confronté à l'évaluation avant ses 13-14 ans peut se construire une personnalité équilibrée et être en mesure d'être évalué car il ne reliera pas ses notes à l'estime de soi. Aujourd'hui, on se rend compte que l'enfant compense par des stratégies dont le mensonge et la tricherie et au pire des cas par le suicide», s'est-il alarmé, soulignant que si l'on échoue au bac, la société nous broie car elle se valorise uniquement sur les titres, les diplômes, et non la valeur travail. «La conséquence de la politique éducative actuelle est l'arrivée chaque année de plus de 250 000 bacheliers dans les universités mais étant donné la gestion actuelle, leurs diplômes ne valoriseront pas leur insertion dans le monde professionnel dominé par la technologie», a-t-il déploré. Toutefois, chez lui, le pessimisme n'est pas de rigueur et pour enrayer ces phénomènes, il recommande «une révision du système éducatif sur la base de la formation d'individus qui ne ressentent pas l'échec scolaire comme un échec social».