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Un grand hommage à Farid Ali
Colloque sur la chanson révolutionnaire
Publié dans Le Temps d'Algérie le 17 - 02 - 2009

Farid Ali. Le nom, à lui seul, évoque toute une épopée musicale, mais surtout un dévouement pour la cause nationale et un combat dont le tribut a été lourdement et chèrement payé pour libérer le pays du joug colonial. Même s'il est, à un certain point, parmi les artistes qui ont mis leur carrière au service de la glorieuse révolution de novembre, parmi les moins évoqués, Farid Ali est, sans doute, l'un des plus engagés.
L'interprète de la célèbre chanson A yemma sver ur tsru (ô mère, retiens tes larmes), composée par Mohamed Sahnouni et dont la musique est attribuée à l'immense maestro Iguerbouchène, n'a eu qu'une sorte de triste reconnaissance pour un digne ambassadeur de la cause libératrice.
Sous le haut patronage de la ministre de la Culture et sous l'égide du wali de Tizi Ouzou, le comité des activités culturelles et artistiques, en collaboration avec Mas Production, organise du 17 au 19 février un hommage sous forme de colloque, à la hauteur de la grandeur de l'homme, à la Maison de la culture Mouloud Mammeri sous le thème «Colloque sur la chanson révolutionnaire».

Des conférences et des témoignages
Un programme riche et varié a été concocté par les organisateurs. Une délégation devait se rendre à Bounouh pour déposer une gerbe de fleurs sur la tombe du défunt. L'inauguration officielle était programmée pour l'après-midi en présence de plusieurs invités, par une exposition permanente d'objets, de photographies, d'articles de presse, au niveau du hall de la Maison de la culture. Une table ronde animée par Abdelkader Bendamèche en présence des membres de la troupe artistique du FLN était au programme de cet après-midi, ainsi qu' une vente dédicace du livre La troupe artistique du FLN 1958-1962, de Bendamèche.
La journée d'aujourd'hui (mercredi) sera marquée par une conférence qui portera sur la chanson kabyle révolutionnaire. Une autre communication sera animée demain, dernier jour des activités, par Tchiko Bouhassoun sous le thème «La chanson révolutionnaire à l'époque coloniale» et une autre par Mme Kherdouci Hassina sous le thème «La poésie féminine de la guerre de libération», qui sera suivie par une vente dédicace de Ramdane Lacheb. L'hommage sera clos par un spectacle qui verra la participation d'amis artistes de Farid Ali et des témoignages sur la vie et l'œuvre de l'artiste révolutionnaire par des membres de sa famille.
Un militant de la première heure
Farid Ali, de son vrai nom Khelifi Ali, est né le 9 janvier 1919, à Ikhelfounène, dans la région de Bounouh, au sud de Tizi Ouzou. A 6 ans, il entre à l'école des Pères-Blancs où, six années plus tard, il décrochera son certificat d'études primaires. A Alger où il s'est rendu en 1935 dans la perspective d'assister sa famille et se permettre une relative autonomie, comme c'était le cas pour la majorité des jeunes de l'époque, il exerce le métier de cordonnier à la rue Amara Ali, près de la place des Martyrs. Dans les années 1940, déjà, il fréquentait assidûment les Ali Qadareine et Ahmed Oumeri qui étaient des bandits d'honneur et qui ne faisaient que se rebeller contre l'occupation française.
Celui qu'on surnommait le rossignol interprétant des textes au verbe fort et acéré a su semer, aux quatre coins de la planète, le droit légitime de son peuple à la liberté. A yemma sver ur tsru a été traduite dans quatorze langues. Après l'indépendance, il n'a eu droit qu'à un seul titre posthume. Deux ans plus tard, à la mort de son père, il traverse la mer pour rejoindre l'Europe. Il se marie avec une Allemande avec laquelle il n'aura pas moins de cinq enfants, tous morts d'une façon mystérieuse.
Son fils Rabah se suicide en 1963 alors qu'il préparait son doctorat en philosophie, Mourad, journaliste à Paris Match, fut assassiné en 1965…).
Dans son café à Boulogne puis au boulevard Gallieni, Farid Ali noua des amitiés avec de nombreux artistes comme Moh-Saïd Oubélaïd, H'nifa, Mohamed El Kamel, El Djamoussi, le compositeur Missoum, ou encore Taleb Rabah, Allaoua Zerrouki et les frères cubains.
L'exil et la prison durant la révolution
Recherché par les autorités françaises, en 1951, suite à un attentat commis contre un responsable de l'ORTF, Farid Ali est alors pourchassé, ce qui le poussera à rejoindre son village natal.
A la même période,
il intégra le PPA/MTLD et se retrouve dans l'obligation de fuir et de se déguiser. A Ikhelfounène, il se remariera et de ce second lit naîtra son fils Arezki. Il passait le plus clair de sont temps en compagnie de Moh-Saïd Oubélaïd et de bien d'autres artistes locaux dans une baraque aménagée à cet effet par ses soins. Militant actif de la Fédération de France, il était activement recherché, ce qui l'obligeait à se mouvoir sans arrêt.
Arrêté durant la révolution en été 1956, il subira, en compagnie de compatriotes, les pires tortures à la prison de Draâ El Mizan, et ce, durant huit mois. Libéré une année plus tard, il s'engage dans la lutte armée. Son statut d'artiste n'a pas échappé aux responsables de la révolution qui l'intègrent dans la troupe artistique du FLN en tant qu'interprète en 1958.
Cette dernière a été un véritable porte-flambeau de la lutte de libération du pays pour une œuvre évaluée à seulement dix-huit chansons.
L'indépendance du pays acquise, Farid Ali aura une seconde fois à retrouver les geôles puisqu'il sera emprisonné par les siens dans le sillage des événements qui ont secoué la Kabylie en 1963. Après avoir purgé une peine de dix-huit mois d'emprisonnement à Berrouaghia, il s'exile encore une fois en France pour reprendre son métier d'antan, la gérance des cafés. Neuf ans durant et parallèlement à cette activité, Farid Ali animera des soirées artistiques au profit de la forte communauté maghrébine, assisté dans cela par nombre d'artistes, dont Chikh Missoum.
En 1976, de retour au pays, il est aussitôt sollicité par Saïd Merriche pour les besoins de son émission radiophonique de la Chaîne II «Chanteurs de demain».
En 1977, à cause de ses problèmes cardiaques, Farid Ali repart en France pour des soins. Deux années plus tard, il rentre définitivement au pays. Il mourut le 18 octobre 1981 à l'hôpital de Boghni, à l'âge de 62 ans.


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