L'Algérie est restée sur sa ligne depuis le début, en appelant au strict respect des résolutions de l'ONU. La coopération bilatérale, la crise irakienne et la situation en Côte d'Ivoire ont figuré hier à l'ordre du jour du tête-à-tête entre les Présidents Bouteflika et Chirac, indique-t-on de source officielle à Paris. La porte-parole de l'Elysée, Mme. Colonna a souligné que ces entretiens, suivis d'un déjeuner de travail auquel ont pris part les ambassadeurs des deux pays, ont permis «une évaluation de la coopération bilatérale avant l'importante visite à Alger du président Chirac». La porte-parole de l'Elysée a également précisé que les deux chefs d'Etat ont «abordé notamment la crise irakienne et la situation en Côte d'Ivoire». En fait, on croit savoir qu'il a été fortement question de l'Irak dans les entretiens entre les deux hommes. Une question qui inquiète au plus haut point, d'autant que la guerre voulue par les USA paraît quasi inévitable. Une éventualité abordée par les deux chefs d'Etat, au sens qu'un conflit au Proche-Orient aura des répercussions tant en Algérie qu'en France où il existe une forte communauté de confession musulmane. Aussi, certains observateurs avertis n'excluent pas la possibilité du report de la visite d'Etat de Chirac à Alger, si la guerre éclatait vers la fin du mois de février. Des courants hostiles au rapprochement entre les deux pays pourraient exploiter cet événement pour torpiller la dynamique nouvelle auprès des opinions publiques des deux nations. Le tête-à-tête a eu lieu quelques heures avant que les Américains ne présentent ce qu'ils qualifient de «preuves que l'Irak détient toujours des armes de destruction massive». Pour les Etats-Unis, la guerre est la seule alternative pour s'assurer de l'innocuité de l'Irak en matière d'armes chimiques. Mais pour Alger et Paris, il existe des chances d'atteindre l'objectif de la résolution 1441 sans recours à la force. Les deux pays refusent donc, le glissement vers une logique de guerre, d'où l'intérêt de cette escale parisienne. L'Algérie est restée sur sa ligne depuis le début de cette crise. En appelant au strict respect des résolutions de l'ONU, notamment la 1441, qui invite l'Irak à coopérer avec les inspecteurs de l'ONU, chargés du démantèlement des armes de destruction massive. L'objectif de cet alignement étant d'éviter le pire au peuple irakien. Idem pour la France qui rejette une intervention militaire en Irak sans passer par le Conseil de sécurité de l'ONU. Pour Jacques Chirac, «il faut laisser aux inspecteurs de l'ONU le temps de vérifier et de démanteler ce qu'ils pourraient trouver». Mais la similitude de l'approche est-elle suffisante pour faire barrage à la guerre qui se profile à mesure que le temps passe? Et quel rôle pourra jouer l'Algérie sur la scène internationale pour préserver la paix menacée? Il est clair que le but de la visite de Bouteflika à Paris est de défendre la cause du peuple irakien auprès de l'Occident. Il ne faut pas perdre de vue qu'elle vient après une série de visites effectuées par les émissaires de Sadam Hussein à Alger. La dernière en date a été celle de Tarik Azziz, vice-Premier ministre irakien, qui avait stigmatisé «la position des pays arabes par rapport aux thèses américaines». L'Algérie, qui n'a pas participé à la première guerre contre l'Irak, ni bénéficié d'aides financières en contrepartie de cet alignement, ni ouvert ses bases aux chars et avions de guerre occidentaux, se présente comme un intermédiaire de choix pour les Irakiens, d'autant plus que depuis les événements du 11 septembre, les données se sont complètement renversées sur la scène internationale, en faveur, cette fois, de l'Algérie. Le rapprochement avec les Etats-Unis pourrait, dans ce contexte, jouer en faveur de la paix recherchée. Mais au cas où la guerre se déclencherait en Irak, on ne pourrait, évidemment en aucun cas reprocher à la diplomatie algérienne son indifférence face aux dangers qui menacent un pays frère. Par ailleurs, les deux chefs d'Etat ont abordé d'autres questions d'intérêt régional, notamment l'UMA où, assure-t-on Jacques Chirac a proposé sa médiation entre l'Algérie et le Maroc. Dans ce domaine, la visite de Abdelaziz Belkhadem au Maroc aujourd'hui, constitue un signe de probable réchauffement que la France peut éventuellement accélérer.