Avec près de 250 personnes tuées depuis le 1er janvier, l'année en cours promet d'être particulièrement meurtrière. L'attentat de Hameur El-Aïn, qui a fait douze morts en fin de semaine, relance le débat sur la précarité de l'éclaircie sécuritaire. Avec près de 250 personnes tuées depuis le début de l'année, le terrorisme promet d'être encore particulièrement meurtrier. D'où le propos mesuré et circonspect du général de corps d'armée Mohamed Lamari, qui avait pris à contre-pied les «prévisionnistes» de l'armée, en lançant dans les colonnes de l'hebdomadaire français Le Point: «Le terrorisme avec près d'un millier d'éléments armés, n'est pas encore vaincu.» Depuis la fin de l'été 2002, plusieurs groupes actifs ou de soutien ont été démantelés. Pour la seule région de Boumerdès, quelque 160 éléments ont été arrêtés dans le cadre du soutien au terrorisme. Bénéficiant souvent d'un manque d'éléments concrets contre eux ou de circonstances atténuantes, la plupart sont libérés dans les jours qui suivent leur arrestation par le juge d'instruction. Cela avait fait grincer des dents des responsables de la sécurité de la région de Boumerdès, où le Gspc, entre Boudouaou et Sahel Boubrak, s'est solidement implanté. A Tizi Ouzou et Bouira, plusieurs groupes ont été aussi démantelés sans que cela atténue outre mesure les actions quasi quotidiennes imputables aux groupes armés. Pire qu'ailleurs, dans cette région kabyle, la chasse aux policiers et aux militaires fait vraiment peur, et le décompte macabre, concernant ces deux corps de sécurité, a atteint une centaine de tués. Plus près, dans la Mitidja, le GIA, encore opérationnel, fait rarement parler de lui depuis une année, mais quand il le fait, c'est de façon qui ne laisse pas de marge à la vie. Ayant atteint ses limites stratégiques, militaires et logistiques, le GIA inscrit ses incursions dans une logique de guerre contre tout ce qui vit et ne souscrit pas à sa guerre. Le groupe démantelé à Meftah tendait, selon des sources crédibles, à constituer des cellules urbaines opérationnelles à la périphérie Est de la capitale (zone Meftah-Cherarba-Eucalyptus). Un autre détail plus inquiétant est constitué par la tentative répétée de la part du Gspc de (re)former des cellules actives au niveau de la capitale. Depuis la neutralisation du «groupe des trois» en plein centre d'Alger, au début de l'été 2002, ce souhait est devenu une priorité pour une organisation qui fait des ravages en Kabylie et à l'Est, mais qui demeure inopérante au Centre du fait d'un superquadrillage de la police et des renseignements généraux et qui rend Alger presque imprenable. Les assassinats qui ont ciblé des policiers à Alger, durant la première semaine du mois de février, laissent cependant perplexe. S'agit-il de groupes qui ont pu investir la capitale? Rien n'est assez clair pour le dire, et il n'y a qu'à observer les ratissages menés par la police, depuis quelques jours, dans la capitale pour s'en convaincre. En fait, il faut bien peut-être commencer à penser, en matière de terrorisme, en termes de durée dans le temps. Le discours réducteur et triomphaliste de certains responsables n'aboutit à rien. Les raisons, qui ont mené à ce terrorisme, se sont formées sur presque deux décennies, il serait vain et futile à la fois de penser en venir à bout par l'action militaire et policière, alors que les motifs de la violence armée sont encore là pour constituer d'autres viviers de ce terrorisme théologico-politique. Pire, les formes mêmes que prennent les nouveaux réseaux du crime organisé n'ont rien à envier aux réseaux terroristes, connus jusque-là. La capitale est, pour le moment, assez quadrillée. Le sera-t-elle pour longtemps?