Hier vers 18 h, l'avion spécial transportant les corps des six membres d'équipage a atterri à l'aéroport Houari-Boumediene. Une foule nombreuse, composée essentiellement des familles des victimes, était en attente du transfert des 95 autres cadavres. La colère était à son paroxysme du fait de l'absence totale de tout officiel. Déjà dans la journée, une colère indescriptible régnait, hier, au niveau du salon d'honneur de l'aéroport Houari-Boumediene, où se trouvaient les familles des victimes ainsi que quelques membres d'équipage de la compagnie Air Algérie. «Ils les ont tués, ils les ont tués», s'écrie cette hôtesse de l'air. Ses collègues l'appuient! «Oui, ils les ont tués.» Mais qu'est-ce qui motive ces cris empreints d'accusations? Naïma Boumaâraf, chef de cabine, au niveau de cette compagnie aérienne, nous répond, non sans grande émotion: «L'appareil, contrairement aux déclarations du porte-parole d'Air Algérie, n'est pas neuf. Certes, il est de la dernière génération des 337-200, mais c'est un modèle qu'on ne devrait plus utiliser à la navigation.» Un collègue l'interrompt: «C'est grave ce que tu viens de dire, il faut se méfier de la presse.» Déterminée notre interlocutrice, qui a insisté pour que l'on cite son nom, ajoute: «Ce même appareil a failli s'écraser à deux reprises et j'ai été témoin de cet accident, mais personne n'a voulu écouter nos mises en garde.» «Personne». «Ce sont les responsables qui accordent peu d'intérêt à la vie des passagers». Hier, la révolte faisait l'unanimité, parmi les employés d'Air Algérie. Tout le monde était convaincu qu'on aurait pu éviter cette catastrophe, si les autorités concernées avaient fait leur travail. «On devrait retirer ces appareils, surtout que sur le plan de la maintenance, on est loin des normes internationales appliquées par les grandes compagnies mondiales», nous précise un employé ayant requis l'anonymat. L'hypothèse de l'incident technique a été confirmée, hier, par Nazim Rais, 17 ans, fils de Sid Ahmed Rais, chef de cabine, qui a péri à bord du 737-200. «Mon père m'a appelé quelques heures avant le décollage pour m'informer que le vol sera retardé pour cause de panne technique au niveau de l'aéroport», et de s'interroger: «Pourquoi n'a-t-on pas reporté le vol?» Conscient de la rage qui se lisait sur le visage des membres d'équipage, M.Arezki Ouyahia conseille ses troupes: «Ne répondez pas aux journalistes qui posent des questions pièges.» Et un autre d'ajouter: «Vous êtes là pour partager notre peine, uniquement pour ça.» L'Entv n'a pas échappé aux critiques des membres d'équipage. «Cette chaîne a montré hier un mépris total des victime, et ce, en continuant la diffusion du match après l'annonce de l'accident», précise l'un eux.