La plupart des Irakiens résidant en Algérie, hormis les représentants officiels de la diplomatie irakienne, sont des opposants au régime de Saddam Hussein. Beaucoup ont, d'ailleurs, quitté l'Irak à la veille de la guerre avec l'Iran, et n'y sont plus retournés. Les Irakiens en exil par peur de «représailles» chez eux vivent au fil des guerres un déchirement continuel, pour avoir laissé parents et proches. Des Irakiens, qu'ils soient chez nous ou en Irak, sont, en effet, morts sans avoir dit adieu aux leurs. Aujourd'hui avec la guerre que mène Bush en Mésopotamie, ils vivent, encore une fois, de douloureux moments d'angoisse et d'incertitude. Les dernières 48 heures, beaucoup, à défaut de joindre leur famille en Irak en raison de difficultés de liaison téléphonique, ont appelé leurs différentes relations un peu partout dans le monde, souvent des amis installés en Syrie ou en Amérique par exemple, pour avoir le maximum d'informations. Abou Bouchra, est un Irakien, qui vit en Algérie bien avant la déclaration du conflit irano-irakien. Hormis les compatriotes résidant également en Algérie et qu'il voit de temps en temps, il lui est arrivé de se déplacer jusqu'aux Etats-Unis pour voir quelques neveux au lendemain de la guerre menée par Bush père en Irak en 1991. Des neveux, par ailleurs, rescapés de la guerre entre l'Iran et l'Irak qui a duré près de 8 ans. Abou Bouchra, les yeux rivés à son écran de télévision, a dû veiller jusqu'à 2h pour voir les premiers raids de missiles américains largués sur Bagdad et les autres villes de son pays. Hier, au lieu de se préparer comme d'habitude à la prière du vendredi, il a préféré suivre à la télévision le fil des événements, généralement branchée sur quelques chaînes satellitaires arabes. Selon Abou Bouchra, Saddam Hussein est parvenu au pouvoir non pas à la faveur d'un choix démocratique, mais par la grâce des tanks américains. Placé par la CIA à la tête de ce même pouvoir, il aurait, jusque-là, servi exclusivement les intérêts américains dans la région du Golfe. A commencer par son instrumentalisation dans le conflit avec l'Iran, un conflit où les Irakiens faisaient office de chair à canon et où l'armement était, principalement, fourni par les USA pour servir une guerre dont la facture salée a été payée avec l'argent des pays du Golfe. On aurait pu, pour ce faire, recourir à d'autres solutions plus pacifistes: en assiégeant le président irakien en personne et non pas en imposant un embargo meurtrier à toute une nation. Il aurait suffi dans ce cas de recourir à un référendum par l'entremise de l'ONU, en réduisant en même temps les représentations diplomatiques du régime irakien à travers le monde.