« Les personnalités contemporaines de l'art graphique et du collage tchèques » est l'intitulé d'une exposition plurielle qu'abrite, en ce moment, le musée national des Beaux-Arts d'Alger et ce, jusqu'au 30 octobre. Un art majeur à découvrir... Organisée sous le patronage de M.le ministre de la Communication et de la Culture et de l'ambassade de la République tchèque à Alger, le vernissage de cette exposition qui a lieu mardi dernier a constitué, une fois de plus, l'occasion d'une rencontre mondaine qui a rassemblé une foule de personnalités, notamment l'ambassadeur de la République tchèque, M.Jaromir Marek et de quelques diplomates accrédités à Alger, des professeurs d'arts plastiques et des artistes peintres ainsi que des personnalités officielles telles que Mme Anissa Boumediene. «Le but de cette exposition, révéla M.Jon Czeneovy, 3e secrétaire à l'ambassade tchèque, est de renforcer les liens entre nos deux pays respectifs en vue d'un échange culturel permanent. Et pour ce faire, on ne peut s'arrêter à une exposition de peinture, mais on prévoit à l'avenir un concert de musique tchèque...». Cette manifestation culturelle, l'exposition en l'occurrence, nous a permis de découvrir des créations artistiques de haut niveau réunissant en outre une quarantaine d'oeuvres de quinze artistes tchèques. Ces artistes ont fait appel à deux façons de voir les choses et d'inventer le monde, deux techniques usuelles d'art plastique. Humour et rêverie tchèques gravés D'abord, la gravure tchèque. Celle-ci a connu un épanouissement important à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe. A la fin du XIXe siècle, on cherchera à libérer cette technique de l'emprise de la topographie pour mieux la placer dans son contexte artistique. Ainsi, on l'aidera à se développer grâce à la création d'une section spéciale des arts graphiques à l'école des Beaux-Arts de Prague en 1912 et celle de la société de gravures Hollar en 1917. Depuis, la gravure contemporaine tchèque ne cessera de progresser, grâce aux programmes lancés par les artistes contemporains. Après les surréalistes dans les années 30 avec Karel Teige, Jindrich Styrsky, qui entrent en contact avec André Breton et d'autres artistes parisiens et commencent à réaliser en symbiose avec le cubisme, des visions oniriques, c'est Vladimir Boudnik qui défendra son programme innovateur «d'explosionnalisme» à la fin des années 50 et au début des années 60. C'est le premier spécimen de l'art d'action appelé plus tard «performances» et «structuralisme», des variantes tchèques de l'art informel. Nous sommes dans les années 60, cette période sera marquée par un foisonnement artistique sans précédent qui ne tardera pas à être étouffé sous la pression d'un nouveau modèle, «socialisme identité». En 1970, la sauvegarde de son identité apparaît comme la principale préoccupation des artistes de la nouvelle génération. Ces artistes tâcheront ainsi de renouer avec la tradition des années 60 et de rétablir la continuité avec le riche passé des valeurs culturelles du pays. C'est l'art officiel qui prend le dessus. Cependant, des artistes, qui ne pensent qu'à s'accommoder à ce genre de schéma, prennent, dès le début des années 70 leur propre chemin, tracé au-delà des structures officielles. Dans les années 70, la spécialisation de deux établissements d'enseignement supérieur dans le domaine de l'art, c'est-à-dire l'Ecole supérieure des arts décoratifs (atelier de l'illustration et des arts appliqués) ont contribué dans une grande mesure à l'orientation de la gravure tchèque. Celle-ci a su conserver d'une manière générale les réminiscences de divers courants artistiques du XXe siècle, nouvel objectivisme, surréalisme, cubisme, symbolisme, pop-art... Dans l'oeuvre de A. Born, J.Salamoun, K.Pacovska notamment, la gravure fait partie intégrale de l'illustration, du dessin animé, de la caricature ou de l'image humoristique. «C'est un peu pour contrecarrer cette nature posée et triste des Tchèques», nous dit-on, d'où aussi cette originalité avec laquelle sont rendues ces oeuvres, avec une contemplation lyrique stylisée, empreinte d'une touche de rêverie. Les quatre-vingts années du collage tchèque Le collage, autre technique à laquelle ont eu recours les artistes tchèques, a connu depuis 1913 le même élan que celui de l'Europe moderne. C'est Emile Filla qui inventera cette technique en collant dans un dessin lavé l'étiquette d'une boîte de tabac, suivi de près par Otto Gutfrund qui découvrira les dessins-collages à la suite de nombreux voyages de Prague à Paris. «Les papiers collés» cubistes - morceaux de divers objets comme journaux, papiers peints, fil de fer, bois et autres matériaux collés sur la surface du tableau - commencent à écrire l'histoire moderne du collage. «La poésie visuelle» s'imposera dès 1923 comme une nouvelle perspective dans le collage. L'année 1932 fera découvrir au public praguois les surréalistes tchèques et français et notamment les imaginations lunatiques de Max Ernst... En contact avec l'art mondial de l'époque, le collage apparaît à la fin des années 50 et au début des années 60, comme une méthode attrayante permettant d'intéressantes expérimentations. Les années 60 verront culminer le style, ludique et empreint d'humour, d'Adolf Hoffmeister dont les premiers collages datent de la fin des années 20. L'avant-garde tchèque des années 60 voit dans le collage presque un but à atteindre, une méthode de réflexion et d'appréhension du monde. Le collage va pénétrer tous les domaines de l'art plastique: affiche, illustration, film d'animation, littérature. Beaucoup d'artistes tels Adriena Simotova, Josef Hampl, Ladislav Novak... le considèreront comme un principe créateur majeur, voire unique dans le contexte de leur évolution personnelle y compris ceux présents par leurs oeuvres à travers cette exposition, qui ont tenu à rendre hommage à cette technique en soulignant son rôle dans le contexte de l'art tchèque moderne. Un art vivant qui vaut le coup d'oeil et le déplacement... Les somptueux tableaux de Mohamed Racim y sont exposés également !