La culture est malade de son théâtre qui a donné des signes de faiblesse ces dernières années. Dès qu'on parle de culture à Béjaïa, on se tourne automatiquement et comme par magnétisme, vers ce joyaux d'architecture presque centenaire, qui n'est autre que le théâtre régional de Béjaïa. Narguant la ville, du haut de son imposante stature, cet édifice porte l'empreinte de l'authenticité et reflète la grâce d'une époque révolue, quand des hommes de culture, foulant un sol aussi riche que celui de Béjaïa, se côtoyèrent sur les planches d'une scène dont le premier spectacle remonte à 1935. Après l'indépendance, l'APC en prit possession. Quelques timides spectacles et projections de films furent programmés. Puis plus rien. Le théâtre ferme ses portes et est abondonné à la poussière et aux toiles d'araignées. Avec ce congé forcé, l'oisiveté et le vide pesèrent sur la ville à tel point que les jeunes, en se moquant d'un tel vide disaient à qui voulaient les entendre, que la culture agonisait à Béjaïa. Pourtant en 1986, une lueur d'espoir commença à poindre dans les dédales du TRB, avec l'installation d'une troupe de comédiens sous la direction de Mohamed Ouachek. C'était peut-être encore un essai, mais le jeune metteur en scène Ahmed Khoudi, du TRAnnaba, voyait en ces lieux une chance artistique à saisir. Après un long coma, le TRBéjaïa revenait à la vie. Ce fut pourtant dans un état des plus critiques que la reprise se fera. Le manque de moyens financiers, de structures administratives, de logements pour le personnel et les comédiens, entravaient les activités, au milieu des lamentations de tous. Une première tentative: El-Qassam (Le serment) un montage poétique sur la résistance (1830-1952) sera présenté au public à l'occasion du 20 Août 1986. Avec des moyens limités, la première pièce Harf b'harf sera programmée au 2e festival du théâtre professionnel et fera par ce biais, parler pour la première fois du TRBéjaïa. Cette pièce écrite par Omar Fetmouche, et mise en scène par Ahmed Khoudi, lèvera le voile de l'anonymat en ce qui concerne le domaine culturel à Béjaïa. Mais, au TRB les moyens demeurent restreints. Un SOS est lancé: la RTA (Entv) consentira à céder quelques bandes magnétiques, et des lampes, le TRConstantine prêtera une sono, et le TRAnnaba 5 lampes et un comédien. Le 21 avril 1987, Achkoune verra le jour, une pièce adaptée collectivement de la véritable histoire AHQ du chinois Luxun. Pour une fois, une oeuvre du TR Béjaïa sera présentée et travaillée avec les moyens du bord, à savoir: écriture, costumes, décors, musique, réalisation, etc. Toujours en 1987, et sous la houlette du défunt Abdelmalek Bouguermouh, naîtra H'zem el-ghoula. Cette pièce sera jouée à travers tout le territoire national et sera appréciée par plus de 60.000 spectateurs. Après un tel succès, le TR Béjaïa fera longtemps parler de lui. Dans cette atmosphère de création, une nouvelle production nationale viendra s'ajouter au palmarès des spectacles en 1988: Mia ou mittine. Puis ce fut, la pièce R'djel ya h'lalef qui sera présentée au festival du théâtre amateur de Annaba.