Cette dernière veut désormais arracher sa part du marché international. La Sntm-Cnan mettra en service, le 2 juin prochain, une nouvelle ligne régulière de passagers Alger-Tunis avec le car-ferry «Arielle» affrété pour les besoins de la compagnie. L'«Arielle» a une capacité de 1050 passagers et 149 cabines dont 7 de «luxe». Les passagers embarqueront probablement de la nouvelle gare maritime dont l'ouverture est annoncée pour l'été et dont le coût de réalisation s'élève à 165 millions de dinars. Le lancement de cette ligne passagers obéit à la nouvelle stratégie commerciale de la Cnan, initiée par son P-DG, M.Ali Koudil. En reprenant une de ses anciennes missions, à savoir le transport des voyageurs, la Cnan entend étendre son éventail d'interventions sur des activités annexes. Elle envisage, par ailleurs, d'investir les lignes jusque-là laissées en «jachère» par l'Entmv. Outre la Tunisie, citons l'Italie et prochainement le Maroc, après la suppression, vivement souhaitée, de la barrière imposée par les visas d'entrée. Cet élargissement du champ d'intervention de la Compagnie nationale de navigation intervient à un moment crucial où le transport transfrontalier rencontre certains écueils, notamment avec le retrait de Khalifa Airways et le maintien au sol des Boeing 737 200 d'Air Algérie après le crash de Tamanrasset (en attendant les conclusions de l'enquête). Le transport international des voyageurs risque de connaître cet été une crise sans précédent. Un autre signe annonciateur du rush de passagers est le fait que de nombreux émigrés, candidats au retour définitif au pays, auraient déjà réservé leurs places sur les paquebots de l'Enmtv qui se chargera de leur rapatriement. La Cnan, selon M.Koudil, pourra faire face à la pression estivale. Il déclare: «La Cnan est prête et pourra, à la demande, alléger la charge qui pèsera en été sur cette entreprise. Nous nous préparons à cette opération, nous serons à Marseille ou en Espagne, à titre d'exemple.» Cette stratégie de redéploiement émane surtout du plan de redressement initié par l'actuel P-DG de la Cnan. Cette compagnie a, en effet, changé: elle vit une nouvelle situation induite par un environnement de plus en plus agressif, fait de concurrence à telle enseigne que les pouvoirs publics s'en sont rendu compte puisqu'ils ont - au départ - publié un appel d'offres international à participation et à l'ouverture du capital de l'entreprise à hauteur de 49 %. Cependant, le P-DG de la Cnan a toujours été convaincu qu'avant de privatiser il fallait que l'entreprise soit viable, voire performante. Pari gagné puisqu'il arrive à imposer son plan de redressement à visage humain; vu qu'il n'a jamais été question de licenciement du personnel. Un souci d'ailleurs partagé par les pouvoirs publics. Il est clair donc pour le «capitaine» de la Cnan qu'avec une flotte vétuste et «obsolète» dépassant les vingt-cinq ans d'âge et jamais renouvelée depuis 1970, aucune amélioration durable ne peut être sérieusement entreprise. En priorité donc la vente des vieux vaisseaux, déjà contraignants par la charge qu'ils induisent à la Cnan de par la durée d'immobilisation pour les sempiternels problèmes de maintenance. «Vendre la vieille flotte est une nécessité vitale, son renouvellement s'impose. D'autant plus que le trafic maritime est complètement révolutionné. De plus en plus ‘‘contenarisés'', les bateaux possèdent aujourd'hui leurs propres moyens de levage. Ce qui leur permet un gain de temps et d'argent. Sans moyens adéquats, nos bateaux ne sont plus adaptés au trafic moderne, la seule solution est donc de les vendre tant qu'ils sont encore fonctionnels. 21 navires, qui étaient déjà à l'arrêt, ont été difficilement vendus», confirme M.Ali Koudil. Mais en évitant de recourir à la compression d'effectif, que va faire la Cnan de son personnel navigant une fois qu'elle ne fonctionnera qu'avec dix navires au lieu de quarante comme c'était le cas par le passé. La formule n'a pas échappé au P-DG de la Cnan qui répond: «Il est hors de question de recourir à la compression d'effectif, c'est d'ailleurs un ordre du gouvernement. Nous allons donc exploiter d'autres créneaux, il s'agira de répartir quelque 1200 personnes dans d'autres filières. Une bonne partie du personnel, que nous considérons comme l'un des meilleurs au monde, sera orientée vers d'autres activités indispensables comme la blanchisserie, le ravitaillement, la manutention ou les petits services. Nous allons également mettre sur pied une société d'armement pour mettre des marins sur des bateaux étrangers. Le sureffectif sera également absorbé par de petites entreprises de transport, le placement et autres entreprises de services, nous avons les meilleurs armateurs du monde.» Désormais, la Cnan met le cap sur la modernité, une fois sa vétuste flotte concédée, elle sera en possession de dix navires neufs qu'elle paiera sur le long terme. Avec une part de marché qui a augmenté de 20 à 25%, la Cnan évolue dans un secteur où d'énormes besoins se font sentir et où la concurrence fait rage. Sa seule voie de salut est la rentabilité. Elle s'engage à faire partie des grands.