Quatre noms sont déjà dans le calepin du Président de la République. Le chef de l'Etat inaugure aujourd'hui le colloque international sur les déchets des collectivités locales. Plus que le thème de la rencontre ou le discours que prononcera le Président de la République, c'est la présence du gouvernement au grand complet qui suscite l'interrogation. En effet, les observateurs en sont à se demander si ce n'est pas la dernière apparition publique des deux responsables de l'Exécutif. En effet, il est clair que malgré l'absence de commentaire de l'un comme de l'autre de la situation d'impasse où sont arrivés les rapports entre les deux hommes, il n'en demeure pas moins que la rumeur qui enfle, donne un très probable divorce entre la présidence de la République et la chefferie du gouvernement qui pourrait être consommé dans un proche avenir. Un désaccord sur la gestion des réformes et la prochaine échéance électorale sont autant de sujets qui semblent arrivés à un point de non-retour entre les deux hommes. Un constat renforcé par la non-convocation d'un Conseil des ministres depuis des semaines. De l'avis de nombreux observateurs cet état de fait a tendance à induire une paralysie du pays, dont seules les affaires courantes sont assurées. Au train où vont les choses l'on n'exclut pas l'entrée du pays dans une crise institutionnelle dont il peut très bien faire l'économie à moins d'une année de l'élection présidentielle. En effet, «ce rendez-vous politique majeur impose le dépassement du malaise aux fins de préparer l'alternance au sommet de l'Etat dans des conditions sereines», insiste-t-on dans l'entourage des deux responsables de l'Exécutif. La seule solution, assure-t-on de mêmes sources, serait un changement de gouvernement aux fins de dissiper le malaise, dont les conséquences commencent à se faire sentir à tous les niveaux de la hiérarchie gouvernementale. A ce propos, de sources généralement bien informées, L'Expression a appris que quatre noms sont déjà dans le calepin de Bouteflika. Il s'agit de Abdelaziz Belkhadem, Ahmed Ouyahia, Abdelmalek Sellal et Youcef Yousfi. Ces commis de l'Etat, proches du Président de la République, sont nominés pour succéder à Benflis à la tête du gouvernement. Le choix de ces responsables n'est, en fait, pas fortuit. Ainsi, Belkhadem qui détient déjà le portefeuille de ministre des Affaires étrangères est susceptible de cadrer avec la fonction, pour la simple raison que grâce au poste qu'il occupe déjà, il dispose de contacts assez poussés avec les principales capitales étrangères et est à même de donner une suite aux dossiers lourds dont il a la charge, à l'exemple de celui des accords d'association avec l'UE, pour ne citer que l'un des plus importants. Nos sources révèlent que si cette variante se confirme, Ahmed Ouyahia prendra les Affaires étrangères et Sellal le ministère de l'Intérieur, les deux hommes ont déjà assuré avec succès les deux portefeuilles. Cela dit, les mêmes sources affirment que le chef de l'Etat n'a pas encore définitivement tranché la question et il est fort probable que Ouyahia soit le nouveau locataire du Palais du gouvernement. Ayant eu cette responsabilité, l'actuel ministre représentant personnel du Président de la République dispose, dit-on, des compétences nécessaires à même de gérer la transition jusqu'à avril 2004, tout en maintenant un certain dynamisme à l'action du gouvernement. Le nom de Sellal circule, lui aussi, avec insistance et l'on dit de lui qu'il serait assez apte à prendre en charge l'Exécutif avec un objectif prioritaire: organiser l'élection présidentielle. Le choix de Sellal tient la route au sens qu'il a organisé la présidentielle de 1995 en tant que ministre de l'Intérieur. Il y a enfin Yousfi, véritable outsider, que nos sources évoquent avec la même insistance que les trois premiers. En effet, l'on avance que la possibilité de voir Yousfi driver le gouvernement est prise au sérieux, au sens qu'il pourrait, avec Ouyahia, Belkhadem et Sellal, constituer la nouvelle équipe du Président à même de conduire le pays 11 mois durant. Nos sources, qui n'écartent pas un coup de théâtre de dernière minute, révèlent en substance que l'essentiel des consultations est quasi terminé et qu'il ne reste que mettre le plan en application. En effet, le nouveau gouvernement est, dit-on, prêt à passer à l'action, d'autant que la question de ses relations avec l'Exécutif est aplanie, au sens où au sein du parti majoritaire, on annonce, de sources sûres, l'intention des principaux chefs de file des députés du FLN de ne pas s'opposer systématiquement au programme du futur gouvernement. Il s'agit, selon un cadre supérieur de ce parti contacté par L'Expression, d'éviter une crise institutionnelle, dont les conséquences seraient plus que néfastes sur la stabilité du pays. Le même responsable nous a révélé que quelle que soit la décision du chef de l'Etat, le FLN, en tant que formation qui aspire à l'autonomie, «ne sera pas un facteur de blocage en cette période délicate de la vie de la nation». Aussi, insiste la même personnalité, «le parti appréciera les lois présentées par le futur gouvernement sous l'optique de l'intérêt du citoyen». Quant à l'élection présidentielle, «le congrès est souverain dans ce genre de décision et le congrès extraordinaire décidera si le parti présentera son candidat ou s'alliera à d'autres formations pour le soutien d'une autre personnalité politique». En tout état de cause, même si les noms des futurs successeurs de Benflis sont déjà sur le bureau du chef de l'Etat, il est quelque peu prématuré d'enterrer l'actuel gouvernement avant l'heure. Le coup de théâtre invoqué plus haut peut très bien être une réconciliation entre Bouteflika et Benflis. L'espoir, insistent nos sources, est permis.