Vraiment, il y avait l´embarras du choix pour les programmes du lundi soir. Rien que des reprises de films qui ont marqué leur lointaine sortie. Et des spectacles de qualité: des «péplum», des «westerns spaghettis» et une édifiante biographie de Dorothy Dandridge, l´inoubliable interprète de Carmen Jones. La première grande vedette féminine noire s´y était illustrée aux côtés de Harry Bellafonte, un autre monument de la chanson afro-américaine. C´est pour toutes ces raions que j´ai dédaigné le feuilleton racoleur qui passait sur l´unique pour savourer une fois de plus un western comme on n´en fait plus. Il s´agit évidemment de ce chef d´oeuvre du cinéma italo-américain Le Bon, la Brute et le Truand qui allait annoncer un autre chef d´oeuvre de la composition dramatique Il était une fois dans l´Ouest. C´est une vérité bien établie qu´après des années de production florissante, l´école du western américain s´est sclérosée au point de n´offrir que des scénarios qui se ressemblent de plus en plus, avec des situations standards et des personnages stéréotypés. Il a fallu pour sortir ce genre de l´ornière un sang nouveau et ce sang nouveau ne pouvait venir que de l´Italie, la première concurrente européenne d´Hollywood (les mauvaises langues racontent que durant la Seconde Guerre mondiale, les Américains avaient copieusement bombardé les studios de Cinecitta pour parer à cette concurrence: elle eut pour conséquence directe la naissance de l´école néo-réaliste. Bref! C´est un admirateur fanatique du cinéma américain, Sergio Léone, qui après des stages auprès des maîtres du genre comme Wyler ou Zimermann, va insuffler une vigueur nouvelle à un genre sur le déclin. Après avoir réalisé des peplum décontractés comme Les Titans ou Sodome et Gomorrhe, Sergio Léone s´attaque au western avec Pour une poignée de dollars. Il récidive avec son interprète favori, Clint Eastwood dans Le Bon, la Brute et le Truand. C´est un film construit avec des aventures picaresques d´individus déclassés par la guerre de Sécession et qui vivent d´expédients et d´arnaques. Et l´arnaque qui lance l´intrigue est le coup du faux chasseur de primes Clint Eastwood livre Eli Walach (Tuco) dont la tête est mise à prix, il libère son acolyte et l´abandonne dans le désert. Tout le film sera une suite de vengeances et de rancunes mal digérées. Comme dans la plupart des westerns italiens, il y a beaucoup de violence, de l´hémoglobine et surtout beaucoup de poussière, car comme le refera Sam Peckinpah, c´est dans un western de bric à brac et branlant que se déroule une action à multiples ressorts. Quand Lee Van Cleef, capitaine nordiste, rejoindra les deux compères dans une longue chasse au trésor, on assistera à une dénonciation de la guerre absurde. Cela sera illustré surtout par deux armées qui s´éventrent pour un pont que les deux parties, nordiste et sudiste veulent contrôler sans le détruire. C´est aussi l´occasion de dénoncer le respect des droits de l´Homme dans les camps d´emprisonnement où les orchestres couvrent les séances de torture. Comme à Guantanamo.