Pour la première fois, des autorités qui interviennent dans pas moins que la politique extérieure de tout le pays, parfois ave on doctoral fondé sur des certitudes font leur autoévaluation: «Nous ne comprenons pas». Cela pourrait être lu sous un autre angle: «Nous n´avons jamais compris», ou alors «nous nous sommes trompés». En tout cas, la distance ne serait pas assez grande entre ces trois sentences. Ce n´est pas à ce niveau qu´on peut se permettre de ne pas comprendre. Surtout pas à ce niveau. Là où on dit «gouverner, c´est prévoir», on devrait ajouter: «gouverner, c´est d´abord comprendre». Il est temps de tirer les leçons et de corriger les faiblesses apparues dans les approches de la politique extérieure, de réviser peut-être même notre politique extérieure ainsi que le processus national de prise de décision. La politique extérieure n´a pas à procéder à la mise en oeuvre de visions personnalisées ou personnelles. Elle est le résultat d´une accumulation de réflexions collectives menées par de multiples centres nationaux d´analyses stratégiques et de prospection liant les questions internationales aux questions de défense et de sécurité, chacun ayant une implication sur une autre. Quelle place pour la réflexion collective en Algérie? Le seul institut qui existe pour mener des études de stratégie, à savoir l´Inesg est mourant. La seule fois où l´Inesg a été réllement sollicité, c´était sous feu Liabès et Boukhobza pour suppléer à un manque de vision pour l´avenir. Puis, plus rien. Le président lui-même avait soulevé cette anomalie mais sans prendre de décisions en rapport avec son évaluation. A l´époque de Zeroual, quelqu´un qui avait fait plus tard son mea-culpa dans le quotidien Le Soir d´Algérie, pour ses prévisions et analyses erronées, disait qu´au cabinet de Zeroual, il était chargé de la prévision politique. Il n´avait pas prévu la chute de Betchine et de Zeroual et s´était plus tard trompé en pronostiquant la victoire de Benflis. Là encore, c´étaient des analyses et prévisions personnalisées, personnelles avec les résultats que l´on connaît. Le haut conseil de sécurité quant à lui n´a pas pour mission d´effectuer des analyses stratégiques et de lire l´avenir, pourtant, il dispose d´un secrétariat permanent alors qu´il ne s´est pas réuni depuis onze années, soit depuis l´intronisation de Zeroual le 31 janvier 1994. Pourquoi alors ne pas revoir ses missions et ne pas lui permettre de suppléer à un Inesg qui n´entre plus dans les priorités de l´Etat? L´absence d´un cadre traditionnel de réflexion collective axée sur l´identification des menaces et des risques futurs, la saisie des données essentielles devant permettre de construire une posture globale, une politique extérieure axée sur la préservation des intérêts d´abord nationaux dans un environnement international changeant et porteur d´hostilités explique la difficulté à prendre la décision qu´il faut au moment qu´il faut avec une réduction des incertitudes. L´absence d´un cadre institutionnel (ou les réticences à en reconnaître la nécessité) de condition des réseaux de réflexion stratégique interministériels est jonctionnée à l´occultation par les partis politiques des questions de relations internationales de défense, de sécurité, évacuées en termes de réflexions de tous les programmes et discours partisans tandis que l´université en est restée en marge. La commission de politique étrangère et celle de défense dans les deux chambres parlementaires ne participent pas à l´instauration d´un environnement de réflexion collective. Il ne semble pas exister un lieu institutionnel officiel dans lequel civils et militaires, ensemble confrontent l´expertise, la réflexion et l´expérience, pour évaluer les scénarios futurs, les crises de conjoncture, la simulation des postures possibles afin de mettre en oeuvre un processus d´aide à la prise de décision.