Les populations éprouvent peut-être des difficultés à se projeter dans le futur, après que la tragédie qui a trop duré eut provoqué une rupture traumatisante dans leur façon d´organiser leur vie et de faire des projets. En faisant un retour sur le passé, à la veille de la tenue du référendum sur la réconciliation nationale, elles se demandent pourquoi le sentiment national, dont on disait qu´il était si renforcé, avait-il pu être mis en péril et comment cela a-t-il pu se produire et être mené jusqu´au seuil de la rupture de la cohésion nationale. Or, c´est la préservation de la cohésion nationale qui confère à celle-ci la capacité à devenir un espace de défense et c´est cette cohésion qui diminue la vulnérabilité de la société et même celle des dispositifs de sécurité tant matériels qu´immatériels. Une posture de défense reposant sur la cohésion nationale est d´autant une nécessité que la fin de la guerre froide n´a pas mis fin aux menaces, mais en a généré de nouvelles d´une autre nature. Les anciennes menaces s´exerçaient aux frontières et faisaient appel à des ripostes sur le double registre de la diplomatie et de l´emploi des moyens militaires conventionnels. Aujourd´hui, pour reprendre un adage, le ver est dans le fruit et implique une privatisation de la violence qui crée des zones de non-droit dans lesquelles s´exercent des pouvoirs parallèles qui défient les institutions et les populations. Dans ces zones de non- droit prospèrent toutes les criminalités qui se constituent même en réseaux. Il y a ainsi une confusion dans les priorités étatiques qui se bousculent et qui sont toutes urgentes par leur caractère de gravité. L´Etat depuis le début a priorisé la parade contre les menaces exercées par le terrorisme, car c´est autour du terrorisme que s´articulent les politiques d´actions menées par les autres réseaux de criminalité. La criminalité liée aux réseaux de drogue, de prostitution, etc. cherche à contourner les dispositifs de sécurité alors que le terrorisme se donne pour mission de mettre en péril l´organisation de sécurité interne, et même de sécurité nationale. La priorité des priorités est donc de mettre fin à ce type de violence pour que l´armée se recentre sur ses missions originelles et que les forces de sécurité (gendarmerie et police) rassemblent leurs efforts pour combattre les fléaux qui risquent de ronger la société. En pensant à la réconciliation, les populations intègrent toutes les données liées à tous les types d´insécurité et dont les traitements différenciés devraient s´inscrire dans la perspective d´une paix globale, généralisée.