La capitale vient de subir un véritable séisme. Les scènes de chaos replongent une population déjà éprouvée dans l´atmosphère tragique des années 90, quand l´Etat républicain vacillant avait du mal à réagir et à trouver les moyens de la riposte. Encore une fois, ce sont plus de deux cent cinquante familles qui sont brutalement poussées dans l´horreur et le deuil. Ce sont des gens simples, des travailleurs, des passants, des chômeurs, des pères de famille avec la tête pleine de préoccupations diverses qui ont été visés par un terrorisme frappé de cécité. Heureusement, qu´à présent, l´état des forces républicaines n´est plus le même: bien que les moyens d´information n´aient pas réagi promptement et efficacement, les Algériens, abreuvés copieusement par les chaînes du Moyen-Orient, sont restés soudés à leur téléviseur pour voir l´horreur dans laquelle a été plongé, une fois de plus, le pays: les forces obscurantistes venues d´un Moyen âge et soutenues par des intérêts égoïstes essaient, dans des actes désespérés, de cacher leur désarroi. Acculés de partout, perdant de plus en plus de terrain dans les maquis et la crédibilité vis-à-vis d´une population échaudée par l´expérience négative des années 90, les forces barbares ont voulu démontrer qu´elles avaient encore du punch. Cependant, il y a plusieurs enseignements à tirer de ce énième soubresaut de la bête immonde: Al Qaîda, qui prétend lutter contre l´impérialisme anglo-saxon et qui s´affuble, ce faisant, du costume de la foi, n´est, en réalité, qu´un allié objectif des pays qui occupent l´Irak, la Palestine et qui mettent les pays arabo-islamiques dans une instabilité chronique susceptible de provoquer, un jour, leur ingérence devenue légitime. Sans revenir sur l´acte de naissance d´Al Qaîda et sur ceux qui l´ont portée sur les fonts baptismaux, il devient de plus en plus clair que ce ne sont pas les intérêts anglo-saxons qui sont visés par de tels actes barbares. Ceux qui, hier encore, combattaient sous les instructions des conseillers américains et anglais, ne peuvent retourner leurs armes du jour au lendemain. Et toutes les mises en scène déployées ne sauraient convaincre une opinion publique qui s´aperçoit que, depuis 2001, ce sont les masses populaires arabes qui souffrent et qui paient un lourd tribut à la folle ambition d´hommes politiques plus préoccupés par la conquête ou la conservation du pouvoir que par le développement de leurs pays. Ceux qui ont utilisé (et utilisent encore) la religion à des fins politiques, ceux qui instrumentalisent la foi pour amoindrir les forces de progrès doivent se rendre compte que les circonstances ont changé: ceux-là mêmes qui avaient envoyé les jeunes Algériens faire des stages en Afghanistan et qui flirtaient dangereusement avec le régime des mollahs, sont en train de se mordre les doigts. On a beau dénoncer les carences du régime en place, les injustices sociales, le harcèlement judiciaire, la fraude électorale, rien ne saurait justifier de tels actes barbares. Au moment même où les forces de l´ordre, au prix de lourds sacrifices, s´appliquent à rendre la sécurité possible, au moment même où le pouvoir a commencé à mener des actions prometteuses contre la corruption qui gangrène le pays, au moment même où on nous promet les élections les plus transparentes, ceux qui ont l´habitude de nager en eaux troubles et de profiter du chaos pour se remplir les poches, viennent encore de frapper. Car, en définitive, c´est de cela qu´il s´agit: frapper les esprits!