«Je considère toujours le Festival de Marrakech comme une opération mercantiliste franco-française. Les Marocains y sont traités par flatterie et paternalisme.» Nabil Lahlou, cinéaste marocain. «Tous les créateurs marocains ont été sabotés dès la première édition du Festival de Marrakech, placée sous le signe des copains et des coquins et d´un paternalisme qui vous donne la certitude que vous n´êtes que de pauvres indigènes dans votre propre pays. Jamais je ne me sens autant colonisé que pendant ce Festival du film de Marrakech.» Ces propos de Nabil Lahlou, confirment notre précédante chronique sur le Fifm et notre volonté n´est pas de critiquer le plus grand Festival organisé par le Maroc, mais d´ouvrir les yeux sur des procédés qui n´existent plus de nos jours dans les pays du Maghreb. Suite à cette chronique sur Fifm colonisé par les Français et les Américains, j´ai reçu plusieurs mails, de Marocains, d´Algériens et surtout de cinéastes marocains (qui souhaitaient rester dans l´anonymat) et qui se sont félicités de cette contribution. Ainsi, on saura, par exemple, que le producteur français Daniel Toscan du Plantier qui avait proposé l´organisation de ce Festival dès 1988 à Hassan II et que ce dernier n´y a jamais donné suite. Après sa mort, le conseiller du Palais, André Azoulay, relance l´idée auprès de Mohamed VI (qui adore le cinéma) et qui accepte de créer la Fondation du Festival. Après la mort de Daniel, c´est sa veuve Melita qui hérite de la direction du Fifm. Si Nabil Lahlou exprime ouvertement sa rage, c´est parce que son film Tabite or not Tabite a été purement exclu en 2006 de la sélection du Fifm par Noureddine Saïl, vice-président du Fifm et Bruno Barde, le directeur artistique et seul responsable du choix des films du Festival. C´est sur ce dernier que les critiques pleuvent. Bruno Barde a été imposé par Mme Du Plantier comme directeur général et artistique du Fifm, alors que son véritable statut est PR. Depuis 2004. Il dirige PR Media, filiale marocaine de la société américaine Hill and Knowlton Associate, leader mondial des relations presse. Tout passe par Bruno Barde: le choix des films, le protocole, l´accréditation presse, la technique, la régie, etc. C´est lui qui a écarté les cinéastes et les journalistes algériens. Bruno Barde gère la communication aussi de six festivals de cinéma: Festival américain de Deauville, asiatique, de Deauville, d´Aventure de Manaus, fantastique de Gérardmer, policier de Cognac, international de Marrakech. Il connait tout le gratin de la presse française et l´utilise pour le Fifm. Les bons reportages sur le Fifm, sur I télé, France 24, TV5, Jeune intelligent, Arabies ou encore Première Studio- cinélive, c´est lui. Public Système utilise un procédé connu: prise en charge totale d´une liste de journalistes et cinéastes sélectionnés dans des hôtels cinq étoiles, avec quelques gâteries en prime.... Si on pardonne ces procédés de lobbying qui sont d´usage dans tous les Festivals, en revanche, on critique beaucoup Bruno Barde pour sa sélection et son choix souvent injustes des films pour le Fifm. Il choisit toujours des petits films d´Europe de l´Est, de France ou des Etats-Unis, qui n´ont aucun parcours dans les festivals dans le monde. Ce qui ne donne aucune notoriété au Fifm. C´est Bruno Barde, notamment qui supprimera de la sélection, pour une raison injustifiée Le Prophète de Jacques Audiard, primé à Cannes et nominé aux prochains Golden Globes et Oscars américains, ou Harragas de Merzak Allouache primé à Venise, mais surtout Mascarades de Lyès Salem, qui a été récompensé partout dans le monde et qui n´a pas été sélectionné au Fifm. Ces films intéressent directement le public, les cinéastes et surtout les distributeurs marocains. [email protected]