S´il y avait un poste de médiateur dans les conflits et libre, il irait vers un avocat motivé. Maître Mohamed Djediat, l´avocat d´un prévenu condamné au tribunal à une peine de prison ferme de deux ans pour coups et blessures volontaires à l´aide d´un objet contondant, en l´occurrence un gourdin, était entré dans la salle d´audience, comme s´il était poursuivi par l´ange de la mort, cherchant à lui faire passer les fêtes de fin d´année 2010 outre tombe. Quelle horreur pour cet élégant défenseur encore sous le coup d´un effet dévastateur reçu à la suite du récit débité par Salah L., vingt-deux ans, un habitué des juridictions, commissariats et autres brigades de gendarmerie mais pas récidiviste pour ce qui est du dernier délit en date! Or, cette loi n´est plus... Face au trio de magistrats menés de main forte par ce sacré Brahim Kherrabi, le président de la deuxième chambre correctionnelle d´Alger, l´avocat de Patrice Lumumba (Alger) allait se préparer à livrer une rude bataille autour du concept: «A l´aide d´une arme contondante». Concept qu´il tentera de balayer et du coup, les deux ans de prison ferme, une sentence affligeante que Maître Djediat tentera d´alléger au moins, car des coups, il y a eu. «Et un échange de coups SVP. le président. Nous estimons en cette occasion d´appel d´une décision laquace que le dossier avait été mal ficelé. Et nous déplorons que le tribunal n´ait pas bien mené son instruction pour aller à la vérité», s´était écrié, sans se fâcher, le défenseur qui s´est vite aperçu que Nadia Amirouche, cette merveilleuse conseillère, suivait avec beaucoup d´attention, tout comme son aînée, la non moins merveilleuse Fazia Aït Mesbah qui n´avait pas l´air ailleurs. C´était bon signe pour l´avocat et donc pour la justice. Il faut dire aussi que l´absence de la victime allait beaucoup arranger les choses même si en justice, les absents n´ont jamais tort, car il y a les procès-verbaux d´audition et surtout les attendus du tribunal où tout se joue généralement surtout si le président de section s´avère être un as du pénal et donc, rien ne lui échappe. Par ailleurs, l´avocat prendra la liberté, sans risque d´opposition, de reprendre les faits. Ces derniers dans ce dossier sont éloquents. De quoi s´agit-il? Deux voisins ne réussissent pas à co-habiter. Les mots fusent de mâchoires aux sourires carnassiers. Les mots mènent de suite aux gros mots qui enfantent d´abord de petits maux et arrivent aux mains. Et comme l´un des deux voisins connaît le contenu du casier, il ne va pas quand même se priver à aller dans le sillon des jeux de mains. Et les jeux de mains vont sans discuter, aux jeux de vilains. Et malins sont ceux qui parient un dinar en fausse monnaie pour les résultats à venir. Conscient de ce qu´il avait préparé comme «champ de tir» pour ce qui est de la récidive et de ses suites aux lourdes conséquences, Maître Djediat va alors sortir l´artillerie de l´article 53 du Code pénal et le 53 du Code de procédure pénale, il sera effectivement entreprenant en s´étalant sur les circonstances atténuantes. «Ce qui est certain, c´est qu´il y a eu des coups donnés et reçus. Le problème pour la composition correctionnelle comme il l´avait été pour le tribunal, c´est qui a commencé à donner les coups», a balancé, la tête entre ses larges épaules, l´avocat qui est même entré dans le couloir de la réconciliation. «Notre espoir est de voir ces deux voisins se remettre ici en question, se présenter des excuses qui ne vont tout de même pas les asphyxier, au contraire, ce sera l´eau sur les flammes», a conclu l´avocat qui a terminé la plaidoirie, une main sur l´épaule d´un des voisins. C´était émouvant et réchauffant en même temps. Arborant un large sourire, Kherrabi, le président sera alors poussé grâce à sa très longue expérience, à remercier l´avocat qui avait bombardé la récidive: «Merci, Maître de nous avoir rappelé l´ancienne loi qui considérait la récidive dans le seul domaine du délit répété et puni. Heureusement que de nos jours, la récidive vaut n´importe quel autre délit commis et de ce fait, la cour a retenu les demandes de l´octroi des circonstances atténuantes qu´elle examinera, lors des délibérations à venir, et ce, pour la semaine prochaine», récite le magistrat au regard vif et sain malgré de longues heures de débats, d´attention, de répliques et de nécessaires mises au point tant ce magistrat sait ce que c´est que la police de l´audience. Maître Djediat a-t-il saisi le «SMS» de la cour? Nous verrons bien.