La frayeur et la grande faucheuse ont relayé la joie et la fête en quelques secondes. Les bruyants et irréductibles supporters du CRB qui préparaient le match de Coupe d'Algérie de leur équipe, se sont subitement tus. En quelques secondes à peine, celles durant laquelle, le séisme a frappé, la populeuse rue Mohamed-Belouizdad à Belcourt est passée d'une atmosphère de joie et d'insouciance à son contraire extrême, la frayeur, la peur et l'angoisse. Le tremblement de terre est passé par là. La principale artère du quartier, qui, quelques instants auparavant, était surtout envahie en cette fin de journée, par les véhicules et le concert de klaxons de ces supporters impatients de défiler et les trabendistes d'El-Aqiba, s'est toute de suite transformée en un vaste point de refuge pour les habitants des immeubles longeant cette rue qui traverse le quartier de bout en bout. Premiers instincts ou vieux réflexes, les Bélouizdadis, une fois les premières frayeurs passées, ont tout de suite tourné leurs regards vers les hauteurs du quartier où les multiples séismes et autres catastrophes naturelles de ces dernières années ont fait des victimes, des dégâts matériels et laissé pas mal de séquelles dans les esprits de la population. Des secteurs tels que celui dit de la Carrière, Diar el-Babor, Cervantès ou ce qui reste du vieux bâti d'El Hamma ont tout de suite suscité préoccupations et inquiétudes des résidents belcourtois. Mais, cette fois, les morts et les blessés étaient là où on ne les attendait pas. Ce sont, en effet, des édifices situés sur la grande artère qui ont été touchées. Des immeubles en apparence solides, du moins sans danger et dont les façades venaient d'être peintes en 2001 lors du festival mondial de la jeunesse organisé à Alger, se sont effondrés en partie ou en totalité au niveau de plusieurs points de la rue Belouizdad. C'est le cas d'un immeuble de quelques étages qui s'est affaissé de l'intérieur sur une boulangerie dont les travailleurs étaient affairés à préparer la fournée du lendemain. Bilan tout provisoire: 7 morts, plusieurs blessés et des personnes ensevelies qu'on a cherché toute la nuit à extraire des décombres. Plus loin, c'est un balcon qui s'est effondré sur une mère de famille la tuant sur le coup. Le bilan global et définitif des victimes n'étant pas encore établi à une heure avancée de la nuit, les multiples et incessantes répliques plus ou moins intenses du séisme ont poussé les résidents de ces immeubles à passer la nuit dans le peu d'espace ouvert que la commune possède sur son territoire. Les stades d'Aït Saâda en face du cimetière de Sidi M'hamed et celui du 20-Août-1955 ont reçu des vagues incessantes de familles entières qui y ont passé la nuit. Heureusement, que pour une fois la coupure du courant électrique n'a pas duré trop longtemps (pas plus de 3 heures ), ce qui a permis d'éviter pas mal de désagréments et surtout de parer à la panique inhérente à ce genre de catastrophe. En fait, c'est le lendemain jeudi, que les habitants de ce quartier, désespérés depuis longtemps par tant de fausses promesses de la part de leurs responsables communaux concernant l'entretien, la restauration ou plus simplement le relogement des résidents habitant des immeubles menaçant ruine, découvrent l'ampleur de la catastrophe sur place et ailleurs dans les zones touchées par ce terrible tremblement de terre. Aux services de sécurité et de la Protections civile venue s'enquérir de la situation et participer aux opérations de sauvetage ou d'évacuation des familles vivant encore en danger, ces laisssé-pour-comptes des multiples opérations de relogements ou de recasement du passé, et qui se voient donc, comme de futures victimes potentielles d'une éventuelle autre forte secousse tellurique, tentent, par tous les moyens, d'expliquer leur détresse et leur peur des lendemains. Leurs interlocuteurs ont beau leur expliquer qu'ils ne peuvent rien pour eux, ils n'arrêtent pas de chercher quelqu'un pour trouver une solution à leurs immenses problèmes. Parfois, des jeunes se sont mis à couper ou à ralentir le peu de circulation routière qui traverse le quartier. Hier après-midi, des citoyens ont tenté de prendre d'assaut les logements Cnep situés dans la rue Hassiba-Ben Bouali, non loin de la Maison de la presse. Des échauffourées ont eu lieu avec des policiers venus empêcher ces gens de squatter des demeures comportant, croit-on savoir, des défauts techniques...