Située à une vingtaine de kilomètres de la ville d'Alger, la cité de Benzerga de la commune de Bordj El-Kiffan garde les stigmates de ce séisme. En traversant cette zone, impossible de résister au climat de panique et de désolation qui vous envahit. Des bâtisses détruites et d'autres dangereusement penchées reflètent l'image d'une ville morte. Une seule boulangerie est ouverte. Une foule est massée devant une porte entrebâillée. Les clients s'arrachent les dernières baguettes de pain. Ici les retardataires ont toujours tort. Pas les absents, qui ont eu la chance de sauver leur peau. Devant les bâtisses, vivant sans doute leur dernier moment, des centaines de familles se sont confectionné des abris de fortune, qui avec des couvertures, qui avec des draps, qui ne remplacent pas les vraies demeures. Ainsi elles préfèrent passer la nuit à la belle étoile et le jour sous le soleil de plomb, fuyant leur maison par crainte d'être ensevelies sous leur toit. A Benzerga la rue s'est vite transformée en un espace de refuge pour tous et surtout pour les enfants. La dernière réplique a accentué la peur de rejoindre les maisons. Aujourd'hui ces habitants réclament leur droit d'être reconnus et s'élèvent contre l'ignorance de leur malheur par les autorités. Leurs réclamations d'avoir une tente, de l'eau potable, des médicaments sont loin d'être prises en considération. Dix jours après le séisme qui les a endeuillés, les citoyens de cette localité crient leur détresse. «Personne n'est venue nous consoler ou même nous apporter un soutien moral pour apaiser notre souffrance surtout celle des enfants», témoigne un sinistré avant d'ajouter que ces derniers, traumatisés par le séisme, ne parviennent plus à fermer l'oeil la nuit de peur de revivre le cauchemar du 21 mai. En manque d'eau et d'hygiène et de médecins, les familles réfugiées dans la rue se trouvent face à d'autres dangers, comme le risque des maladies contagieuses qui se fait de plus en plus menaçant notamment pour les enfants. Apparemment les chosent ne s'arrangent pas pour eux, d'autant plus que les autorités font, selon les habitants de Benzarga, la sourde oreille. «Qu'attendent-ils donc pour nous venir en aide; d'autres victimes?» Ce qui ne va pas tarder, car ici les gens s'impatientent quand certains parents ne veulent plus que leurs et leurs enfants restent dans la rue. Le séisme du 21 mai aura, une nouvelle fois, mis en exergue l'imprévoyance et l'impréparation des autorités locales largement dépassées par le désordre induit par les secousses telluriques et les répliques qui les ont suivies. Benzerga est aujourd'hui à multiplier par vingt, tant l'incurie semble générale et généralisée.