Quel que soit l'état de santé actuel de ce leader, il est d'ores et déjà établi que la guerre de succession a bel et bien commencé. De fait, il est déjà question de son remplacement à la tête de ce parti islamiste controversé. Les noms les plus en vue aujourd'hui pour prendre la tête du Mouvement de la société pour la paix sont ceux véhiculés par les cercles influents du parti. Menasra, Bouguerra Sotlani , Ghoul, Mokri et à degré moindre, Bengrina et Hebbaz sont les noms les plus mis en avant et qui bénéficient des appuis nécessaires pour aspirer à la plus haute marche du local du siège du parti à Madania. Bouguerra Soltani représente bien le courant radical au sein du MSP. Cette spécificité lui voue, d'ores et déjà, la sympathie d'une très grande partie de l'électorat du parti, exacerbée par les concessions du cheikh Nahnah, et qui n'ont abouti qu'à diluer le parti et à le vider de sa force originelle. Bouguerra Soltani, qui a déjà été ministre du MSP au gouvernement, présente l'avantage et l'inconvénient d'avoir été très proche de Nahnah, l'homme «fort en gueule» du parti et de ne pas partager la ligne de conduite du Président de la République ni du Chef du gouvernement. Menasra et Ghoul, deux autres hommes forts du parti, font aussi florès au sein de la mouvance MSP. Avec ceci en prime: ils ont côtoyé le pouvoir (mention spéciale pour Omar Ghoul qui a réussi à se faire accepter et respecter par plusieurs gouvernements successifs) et présentent l'avantage d'être «politiquement corrects», c'est-à-dire qu'ils s'inscrivent dans une «ligne constitutionnelle» qui fait d'eux des hommes politiques «fréquentables». Mais, justement, cette dernière mention peut leur nuire, quand on tient en ligne de compte que la mouvance MSP, à la base, commence à lorgner d'un très mauvais oeil ces leaders qui «s'acoquinent aujourd'hui aussi facilement avec ceux-là mêmes qu'ils lacéraient hier». Ignoré par tout le monde, Farid Hebbaz doit être bien surveillé par les analystes. Vice-président du parti, il est -théoriquement du moins - le n°2 du MSP et veille, depuis le retour du cheikh en Algérie, à l'état de santé de Nahnah et à filtrer ses visites au compte-gouttes. Cela peut le placer à court terme dans une position d'outsider, malgré son poids insignifiant parmi les ténors du groupe. Abdelkader Bengrina, l'ancien ministre du Tourisme et de l'Artisanat, présente l'immense avantage d'avoir la bénédiction de certains cercles du pouvoir. Islamiste version très soft, il ne peut ni déranger la politique officielle ni représenter un quelconque danger. Dans un pays où l'élection des leaders d'un parti obéit à des considérations politiques «plus hautes», il y a lieu de tenir sérieusement la candidature de Bengrina comme vraisemblable. Vis-à-vis d'eux-mêmes, ces leaders s'organisent comme suit: Mokri soutient Bouguerra, Bengrina soutient Ghoul, car Ghoul a le soutien de certains centres de décision et tous ces leaders seront attentifs à la donne Ouyahia, revenu à la tête du gouvernement. Le MSP, qui a constitué le justificatif d'un Etat démocratique et qui tolère un islamisme constitutionnel, a de quoi se faire du souci. Le brusque effacement de Nahnah signifie un peu la mort d'un parti qu'il a hissé vers les sommets en usant souvent d'un équilibrisme équidistant qui n'est pas à la portée de tous.