Si la position d'Alger est recevable dans le fond, au plan de la forme, on a usé de moyens quelque peu disproportionnés. «Nous regrettons cette décision et espérons que les journalistes étrangers pourront de nouveau travailler en Algérie dans des conditions normales, le plus rapidement possible.» C'est en ces termes que s'est exprimé la porte-parole du Quai d'Orsay Cécile Pozzo di Borgo pour commenter l'expulsion des équipes de journalistes français d'Algérie. En effet, les chaînes françaises TF1, France 2, France 3 et La Chaîne parlementaire (LCP), ainsi que la chaîne belge RTBF ont été empêchées par les autorités algériennes de couvrir la libération de Ali Benhadj. Tôt dans la matinée de mercredi dernier, des éléments des services de sécurité avaient bouclé tous les accès de l'hôtel El-Djazaïr, interdisant à tout journaliste étranger de mettre le pied hors de l'établissement hôtelier. Du côté du ministère de la Communication et de la Culture, on affirme qu'il n'était pas dans l'intention du département de Khalida Toumi d'expulser les journalistes européens. Des sources proches du ministère ont informé ces médias de la décision des autorités centrales de ne pas leur permettre la couverture de la libération de Ali Benhadj et Abassi Madani. Ces mêmes sources révèlent que les journalistes français étaient accrédités pour rendre compte du retour d'Air France en Algérie. Au ministère de la Communication et de la Culture, on insiste sur cet aspect, de sorte que tous les envoyés spéciaux «ont été invités à ne pas quitter leur résidence à Alger» le jour de la sortie de prison du n°2 de l'ex-FIS, aux fins d'éviter qu'un des leaders du parti dissous fasse une déclaration politique. Abassi et Benhadj sont en effet déchus de leurs droits civiques pour une période de 5 ans. Cela pour le fond, ce qui est tout a fait dans l'ordre des choses. Cependant, les observateurs regrettent la méthode «policière» qui a prévalu lors de l'application de la décision du ministère. Sachant la sensibilité de la chose, ces mêmes observateurs relèvent l'absence de tact des autorités algériennes qui, au vu de l'importance politique de l'événement, auraient dû dépêcher leur ministre de la Communication, pour expliquer de vive voix la position des pouvoirs publics. En effet, on estime dans les milieux médiatiques nationaux que Khalida Toumi avait assez de temps pour prendre les devants et sensibiliser les confrères étrangers quant à la nécessité de ne pas mettre «le scoop», au-dessus de toute autre considération. En fait, si la position d'Alger est compréhensible dans le fond, force est de reconnaître qu'au plan de la forme, on a usé de moyens quelque peu disproportionnés. Enfin, quant à la réaction épidermique du Quai d'Orsay qui se dit soucieux «du respect de la liberté de la presse et de l'exercice de l'activité professionnelle des journalistes partout dans le monde», il semble oublier que des nations autrement plus développées dans le domaine des libertés démocratiques ne se gênent pas de pratiquer la censure d'autorité à des médias étrangers, sans que cela fasse scandale. Les Etats-Unis, voire la France ont interdit la diffusion de certaines images au nom des intérêts supérieurs de la nation.