La rencontre a drainé beaucoup de personnalités ayant marqué à leur manière une étape ou une autre, aussi bien de l'histoire de la ville de Tizi Ouzou que de la culture berbère. Quand la littérature et la nostalgie se croisent dans une salle de conférences, une rencontre telle que celle vécue samedi dernier à la maison de la culture Mouloud- Mammeri de Tizi Ouzou elle ne peut qu´être attrayante. Le fait que la rencontre ait porté l´intitulé générique de la «Kabylie d´antan» a drainé une foule, non seulement nombreuse, mais aussi constituée de personnalités ayant marqué à leur manière une étape ou une autre, aussi bien de l´histoire de la ville de Tizi Ouzou que de la culture berbère. On pouvait ainsi distinguer dans la salle, la présence de Ali Benslama qui a été un membre fondateur de la Jeunesse sportive de Kabylie dans les années 1940. Il y avait aussi Abdennour Abdeselam, un défenseur acharné de la berbérité et de la laïcité. Parmi l´assistance, il y a lieu de noter également la présence de nombreux enseignants d´université, Abderrahmane Yefsah, l´écrivain récipiendaire du deuxième prix Tahar Djaout du meilleur roman. Ce qui est remarquable lors de ce rendez-vous littéraire, c´est la présence nombreuse de femmes. Ces dernières ont montré, suite à leurs interventions, qu´elles ont toutes lu des livres des écrivains Mohammed Attaf et Bahia Amellal. On n´ira pas jusqu´à conclure que les femmes lisent plus que les hommes, mais on ne se trompera pas sans doute en disant, que lors de ce Café littéraire, c´est la gent féminine qui a joué les premiers rôles. Est-ce parce que parmi les intervenants il y avait une femme écrivaine? Tout porte à le croire. En tout cas, le café littéraire de ce début de semaine a été l´occasion de jeter un regard, certes, divergent mais très intéressé sur l´histoire d´une région marquée par une multitude d´événements et empreinte d´une somme de spécificités qui ne lui ont pas toujours profité. Des questions ont été adressées aux écrivains au sujet des missionnaires français. Une interrogation rebondissait tel un leitmotiv: «Les Pères Blancs et les Soeurs Blanches ont-ils tenté de mener une campagne de christianisation?». La réponse de Bahia Amellal est sans équivoque: «Les Soeurs Blanches nous apprenaient tout ce qui a trait à la vie, mais elles ne parlaient jamais de religion». L´auteur du livre Dans le giron d´une montagne a, en revanche, indiqué que les missionnaires ne parlaient pas de religion chrétienne parce que tout simplement l´Etat français le leur interdisait. «Au tout début, les missionnaires ont tenté de le faire, mais il y eut une réaction énergique de la part des algériens telle qu´ils ont fini par changer de méthode». Bahia Amellal a insisté sur le fait qu´il faille reconnaitre une chose à ces missionnaires, à savoir l´ouverture des écoles où il fut permis d´apprendre les langues et les autres matières ainsi qui leurs actions qui s´inscrivent dans la trajectoire humanitaire. Il va sans dire que l´on ne pouvait pas parler de cette période sans citer un personnage qui est de plus en plus en passe de conquérir une dimension mythique dans la région. Il s´agit du Père Charles Deckers, assassiné à Tizi Ouzou dans un attentat, en décembre 1994. Les témoignages ont abondé pour mettre en exergue les actions menées par cet homme altruiste à l´égard des Kabyles. «A aucun moment, le Père Deckers n´avait prêché le christianisme en Kabylie», a insisté un septuagénaire vivant à Tizi Ouzou et qui a connu l´homme. Dans la foulée, Abdennour Abdesselam a tenu à rappeler que jamais dans l´histoire des villages kabyles, des problèmes se sont posés à cause du choix libre inhérent aux religions. «Dans les villages kabyles, la religion est considérée comme étant une affaire personnelle et chacun était libre de se convertir à une autre religion. «D´ailleurs, un terme existe même dans les villages pour désigner la conversion en religion, c´est «yettourni». De même qu´une formule pour jurer «jmâa liman» démontre le respect que vouent les Kabyles à l´ensemble des religions», rapporte Abdesselam Abdennour. Le romancier Mohammed Attaf, lauréat du Prix de la meilleure oeuvre littéraire Apulée en 2007, décernée par la Bibliothèque nationale a, quant à lui, parlé longuement de la ville de Tizi Ouzou, qu´il ne cesse de raconter, de manière insatiable dans ses livres. L´auteur du roman La Sainte a expliqué que dans ses livres, il raconte la réalité de la vie dans la ville de Tizi Ouzou à une certaine époque. Evoquant la question du colonialisme, Mohammed Attaf, en réponse à un jeune, a indiqué qu´il n´y a pas que ceux qui ont vécu l´époque coloniale qui peuvent mesurer l´ampleur de la sauvagerie des colons contre les Algériens.