«L'Algérie a connu deux cycles constitutionnels» Les réformes doivent consacrer le renforcement de la logique de l'Etat contre la consolidation de celle du pouvoir. Pour réussir les réformes politiques proposées par le président de la République et les conduire à bon port, cela suggère l´implication de toutes les forces vitales du pays. Et elles doivent consacrer le renforcement de la logique de l´Etat contre la consolidation de la logique du pouvoir. De telles conclusions ressortent de la conférence-débat, placée sous le thème «Réformes politiques en Algérie», animée hier au Centre de recherche stratégique et sécuritaire (Crss), à Ben-Aknoun (Alger), par un constitutionnaliste et un sociologue. Le Dr Walid Agoun, spécialiste en droit constitutionnel, se demande si les réformes politiques proposées par le président de la Républiques sont à la recherche d´un projet de société portant sur le renforcement de la logique d´un Etat de droit. Ou s´agit-il de réformes en quête d´un projet de société portant sur la consolidation de la logique du pouvoir? En décortiquant les quatre Constitutions (1963, 76, 89, 96) qu´a connues l´Algérie depuis l´Indépendance, le constitutionnaliste a souligné que ces dernières n´ont pas été discutées largement ou votées librement, et non plus appliquées. Selon lui, «l´Algérie a connu deux cycles constitutionnels». Le premier cycle s´étale, a-t-il noté, de 1962 jusqu´en 1989 et repose sur la légitimité révolutionnaire. Tandis que le second, s´étend de 1989 à ce jour, mettant à crédit la légitimité constitutionnelle. Et d´expliquer, que la Constitution de septembre 1963 a été le produit d´une Assemblée constituante. Donc, elle n´a pas été librement débattue. Bien qu´elle consacrait le caractère républicain de l´Etat, néanmoins, a-t-il relevé, la Constitution de 1963 renforçait la logique du pouvoir, tirant sa crédibilité de la légitimité révolutionnaire. S´ensuit la Constitution de 1978, après un vide constitutionnel de 2 ans géré par ordonnance du président Houari Boumediene. Celle-ci fut inspirée de la Charte nationale de juin 1976. Elle a été donc établie par le parti unique, conduit d´une main de fer par le président. Elle avait consacré, en conséquence, le socialisme et le renforcement de la logique du pouvoir. Un pouvoir absolu instauré par le président d´alors, soutenu par le parti unique, au détriment du caractère républicain de l´Etat et maintenu par Chadli Bendjedid. Ces deux Constitutions renseignent donc sur la logique du renforcement du pouvoir, établi durant le premier cycle constitutionnel s´appuyant sur la légitimité révolutionnaire. Pour ce qui est du deuxième cycle, ce dernier a pris forme à la suite des événements d´Octobre 1988. Donc, à l´avènement de la Constitution de novembre 1989, l´Algérie a entamé un nouveau cycle constitutionnel. Aussi faible soit-il, le nouveau cycle a consacré, visiblement, le renforcement de la logique de l´Etat de droit. Pour le Dr Walid Agoun, la Constitution de 1989 devait marquer l´avènement d´un Etat de droit consacrant la légitimité constitutionnelle. Peine perdue, à la suite des évènements tragiques qu´a connus l´Algérie, le pays a été donc confié, de l´avis du conférencier, à des structures de transition: Haut conseil d´Etat en l´occurrence, jusqu´à l´arrivée de Liamine Zéroual. Ce dernier a mis en oeuvre en 1996, la 4e Constitution. Celle-ci devait limiter les mandats, c´est-à-dire renforcer le caractère républicain de l´Etat et consolider, par voie de conséquence, la légitimité constitutionnelle pour instaurer enfin l´alternance au pouvoir. La quatrième Constitution était amendée en 2008. L´objectif était l´abrogation de son article 74, portant limitation des mandats. C´est le retour à la case départ, a fait remarquer le conférencier s´interrogeant sur l´objectif des réformes annoncées. Intervenant à son tour, le sociologue Nacer Djabi, pense que les consultations actuelles ont peu de chances de réussir, car elles sont menées de manière unilatérale. «Les réformes n´ont pas associé toutes les forces vives du pays et elles n´ont pas été l´objet d´un large débat», a-t-il souligné. Il estime qu´elles doivent cibler des objectifs bien précis, arrêtés au préalable, et menées de manière multilatérale.