El Gueddafi de plus en plus isolé tente un nouveau coup de poker Menaces et contre-menaces s'enchaînent. L'issue du 17e Sommet de l'Union africaine, qui s'est achevé vendredi à Malabo, a engendré des réactions vives et très pertinentes. Menaces et contre-menaces s'enchaînent depuis. L'Union africaine qui a réussi à trouver un consensus entre ses membres, s'est déclarée satisfaite après avoir adopté un texte qui doit servir de base aux négociations entre les parties libyennes. Les chefs d'Etat ont aussi, même difficilement, adopté un accord-cadre proposé aux parties libyennes prévoyant notamment que le leader libyen Mouamar El Gueddafi ne devrait pas participer aux négociations afin de sortir son pays de la crise ainsi que l'instauration d'une «force de maintien de la paix». Les membres de l'UA, ont par ailleurs décidé de ne pas coopérer à l'exécution du mandat d'arrêt délivré par la Cour pénale internationale contre le colonel El Gueddafi. Difficilement unanimes, les décisions ont été ardues à obtenir, mais au bout du compte, c'était - selon des dirigeants africains - le seul moyen de dégeler les négociations. La première déclaration, condamnant les décisions de l'UA, était celle d'El Gueddafi qui, sans surprise, a peu apprécié son éloignement des futurs pourparlers inter-libyens. Mais c'est surtout à l'Europe qu'El Gueddafi s'en prendra en premier lieu. Le leader libyen a abondamment et de manière directe menacé l'Occident. Le peuple libyen est «capable de porter un jour la bataille en Méditerranée et en Europe», a assuré le colonel El Gueddafi dans une allocution diffusée vendredi soir par haut-parleurs sur la Place Verte de Tripoli. «Ils pourraient s'en prendre à vos foyers, vos bureaux et vos familles, qui deviendraient des cibles militaires légitimes puisque vous avez transformé nos bureaux, nos quartiers-généraux, nos maisons et nos enfants en cibles militaires que vous considérez comme légitimes», a-t-il ajouté à l'adresse des dirigeants européens, s'exprimant depuis un lieu tenu secret. «Nous vous conseillons donc de faire marche-arrière avant de subir une catastrophe», a exhorté le dirigeant libyen sous les applaudissements nourris de ses partisans et les rafales tirées dans l'air. En réponse au discours du leader libyen, et aux menaces franches à leur encontre, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a invité, à Madrid, le colonel El Gueddafi à «faire passer en premier le bien-être et l'intérêt de son peuple, quitter le pouvoir et faciliter une transition démocratique (...), plutôt que de proférer des menaces». A ses côtés, son homologue espagnole Trinidad Jimenez a assuré que «la réponse de l'Europe est de continuer à travailler avec la même résolution» et de maintenir «la même pression politique et militaire» jusqu'au règlement de la crise. Allant plus loin, ces derniers ont promis que l'Otan maintiendra la «pression» si le dirigeant libyen ne quitte pas le pouvoir. Ainsi, l'Otan a annoncé hier avoir intensifié ses bombardements dans l'ouest du pays, détruisant une cinquantaine d'objectifs militaires durant la semaine écoulée. Les opérations ont visé des objectifs allant des montagnes du Djebel Nefoussa, près de la frontière tunisienne, à la ville de Misrata, à plus de 200 km à l'est de Tripoli, selon un communiqué de l'Alliance atlantique. Les membres de l'UA, ont par ailleurs décidé de ne pas coopérer à l'exécution du mandat d'arrêt délivré par la Cour pénale internationale contre le colonel El Gueddafi, jugeant qu'il compliquait le règlement de la situation. Cette décision, qui pourrait faciliter l'exil du colonel dans un Etat africain, a été froidement reçue par Hillary Clinton, celle-ci soulignant que «La mise en cause devant la CPI était constitutive de la résolution» 1973 de l'ONU autorisant le recours à la force en Libye, et que celle-ci avait en particulier été approuvé, en mars, par les trois Etats africains alors membres du Conseil de sécurité, à savoir le Nigeria, le Gabon et l'Afrique du Sud.