L'acteur américain Morgan Freeman, militant de longue date contre la discrimination raciale, assure que le racisme est «toujours bien vivant» aux Etats-Unis, mais se dit confiant qu'avec le temps il sera possible de l'éradiquer. L'acteur, qui a incarné dans Invictus de Clint Eastwood le rôle de Nelson Mandela, héros de la lutte anti-apartheid, devenu le premier président noir d'Afrique du Sud, assure que dans sa ville de Charleston (Mississippi) «les enfants, aujourd'hui encore, ne se fréquentent pas entre Blancs et Noirs». «Le racisme est toujours bien vivant aux Etats-Unis et pas seulement dans le Sud-Est», souligne l'acteur noir de 74 ans, qui a tourné le dos aux collines de Hollywood malgré ses cinq nominations aux Oscars pour s'installer dans le Mississippi, historiquement un bastion des ségrégationnistes aux Etats-Unis. Dernier exemple en date, le meurtre en juin dernier dans la capitale du Mississippi, Jackson, d'un Noir de 49 ans par un adolescent blanc, qui avait, avec des amis, décidé de s'en prendre gratuitement à une personne de couleur. Sans compter avec le refus mardi de la justice américaine de gracier Troy Davis, condamné à mort en 1991 pour le meurtre d'un policier blanc et dont les partisans considèrent qu'il est le prototype du Noir condamné à tort. «Nous avons un président noir et regardez par quoi il est en train de passer», souligne par ailleurs l'acteur au débit de parole lent, vêtu d'un jeans et d'une chemise blanche. Et Morgan Freeman de critiquer la mouvance ultraconservatrice du Tea Party, née en 2009 de la colère d'électeurs affectés par la crise économique, estimant qu'il est un obstacle à l'union du pays. «Maintenant, c'est encore pire (qu'il y a quelques années) parce que nous avons ce groupe du tea party qui détruit le Parti républicain en chuchotant: «Vous vous rendez compte que nous avons un homme noir à la Maison-Blanche? Ce n'est pas possible». Selon un récent sondage de l'Institut Brookings, 46% des Américains pensent que les Blancs sont tout autant la cible de discrimination que les Noirs et les autres minorités face à 51% qui ne le pensent pas. «Peut-être que nous sommes le seul pays qui a fait une guerre pour cela? Non pas pour une question de territoire, mais pour avoir le droit de maintenir en esclavage les Noirs. C'est une question économique», assure Morgan Freeman interrogé à Clearwater, ville touristique de Floride où il participe à la promotion du film pour enfants «L'incroyable histoire de Winter le dauphin». «Afin de maintenir un être humain dans une telle position, il faut le réduire à quelque chose de moins qu'humain. Et cela prend des générations pour effacer cette idée», a ajouté l'acteur qui avait remporté l'Oscar pour un second rôle dans Million Dollar Baby (Eastwood, 2005). «C'est un enseignement sur plusieurs générations», estime-t-il en caressant sa main droite restée paralysée à la suite d'un grave accident de voiture en 2008. Mais le racisme «va prendre fin», ajoute l'acteur sourire aux lèvres. «Chaque nouvelle génération est moins encline à participer à ce type de discrimination», insiste Morgan Freeman du haut de son 1,89 m, qui a également joué dans La rue, Miss Daisy et son chauffeur et Les évadés.