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Les écrivains parlent des nouveautés du Salon
Publié dans L'Expression le 26 - 09 - 2011

Les six auteurs résument en quelques mots leur dernière publication.
Avant-hier, samedi, ils étaient des centaines les écrivains qui ont fait le déplacement à Ben Aknoun au Salon international du livre afin de dédicacer leurs livres parus à cette occasion. A chaque coin de stand, on pouvait distinguer un ou deux auteurs en train de signer son livre ou d'échanger des propos avec ses lecteurs ou des lecteurs potentiels. L'occasion nous a été offerte pour approcher ces auteurs auxquels nous avons tendu le dictaphone pour qu'ils puissent résumer en quelques mots leur dernière publication. Suivons-les...
Smail goumeziane
Mon tout nouveau livre que je présente ici au SILA concerne l'histoire de notre pays depuis les origines jusqu'à aujourd'hui. Il s'intitule: L'Algérie, l'histoire en héritage. Alors pourquoi l'histoire en héritage? Tout simplement, je suis parti de l'idée que la seule chose qui vraiment relie tous les Algériens, c'est l'histoire qui est commune à chacun d'entre nous. A partir de là, j'ai effectué ce travail qui m'a permis de découvrir que l'histoire de l'Algérie est traversée depuis des siècles par deux logiques contradictoires. Une logique qui est de sédimentation-transformation. En d'autres termes, à chaque période qu'a connue l'Algérie, d'abord à l'intérieur et avec les envahisseurs, on a constaté qu'il y avait des éléments de civilisation qui sédimentaient et des éléments qui ne duraient pas. A titre d'exemple, malgré la présence en Algérie des Romains et des Carthaginois pendant treize siècles, il n'est pratiquement rien resté de ces civilisations parce que le sédiment fondamental qui est resté accroché à l'Algérie, c'est la berbérité. Donc, la berbérité a su résister pendant treize siècles à la romanité et aux Carthaginois et le peuple algérien n'a pratiquement rien retenu de ces périodes. Dès qu'on passe à l'arrivée des Arabes, on se rend compte au contraire que le sédiment berbère a su intégrer le sédiment de l'Islam et de l'arabe pour constituer un nouveau sédiment plus fort qui était la berbérité, l'arabité et l'islamité, tellement fort que lorsque la colonisation française va arriver, celle-ci va essayer de casser ce socle. Malgré les énormes moyens de la colonisation française, malgré la violence et les massacres, celle-ci n'a pas réussi à faire éclater le socle historique de l'Algérie. Et grâce à ce socle, la résistance s'est organisée. C'est la deuxième logique depuis toujours, l'Algérie est une terre de résistance. Comme à l'époque des Romains, la résistance s'est structurée contre le colonialisme français et a réussi à partir de 1954 à le vaincre. J'aborde aussi la question de l'indépendance. Que s'est-il passé depuis l'indépendance? On constate que malheureusement, à la logique de résistance, est également apparue une autre logique qui existe depuis toujours, c'est la logique des rivalités intestines. Depuis toujours, bien qu'il ait toujours été résistant, le peuple algérien a toujours été limité dans son action par des rivalités intestines entre Algériens qui ont quelquefois perturbé le sens de l'histoire. Nous avons aujourd'hui des difficultés importantes à faire passer l'Algérie dans un autre socle sédimentaire qui est actuellement à l'honneur dans le monde et dans les pays arabes, le sédimentaire démocratique. Je termine le livre en pensant que, lorsque la berbérité, l'arabité et l'islamité s'adjoindront au socle sédimentaire démocratique, alors on sera un pays moderne et on pourrait avoir pour nos enfants une histoire qui se poursuit dans la prospérité et dans le bonheur pour tous.
Mohamed balhi
Biskra, Miroir du désert est un beau livre sur une cité qui a un passé prestigieux. Il ne faut pas oublier que Ibn Khaldoun a vécu à Biskra pendant six ans. Il y a pas mal de choses à dire sur cette ville. L'idée de réaliser ce livre est d'abord liée au fait que je suis originaire de Biskra. J'ai constaté qu'il y a un vide dans ce créneau. Je trouve qu'il faut écrire sur pas mal de villes comme Béjaia, Adrar... De toute façon, il y a beaucoup de cités qui méritent que l'on réalise ce genre de livres sur elles. J'ai opté pour le beau livre parce que le lecteur pourra y trouver des cartes postales, il y a des photos de peinture. Biskra est une ville qui a été peinte par les plus grands artistes peintres. Dans ce livre, je propose quelques tableaux comme ceux d'Henri Mathis ainsi que des tableaux de peintres italiens. La réalisation de ce livre a nécessité de la recherche. Il ne s'agit pas d'une documentation toute prête à exploiter car quand on veut faire un beau livre sur Alger, on peut facilement trouver de la documentation. Mais quand il s'agit de certaines régions d'Algérie, c'est un peu difficile. Il faut avoir la volonté et surtout la patience et bien sûr, il faut avoir la passion.
Catherine rossi
L'idée de réaliser ce beau livre intitulé Les carnets de Tlemcen est née d'un voyage parce que l'aquarelle est souvent liée au voyage. Quand je voyage, je commence par peindre et dessiner et puis vient l'écriture. Dans le cas de Tlemcen, ce sont des choses qui sont vraiment très liées puisque cette région recèle un patrimoine absolument magnifique, en particulier, en patrimoine religieux avec les mosquées les plus anciennes d'Algérie avec même des medersas illustres qui ont disparu et m'ont impressionnée d'après les gravures qu'on a pu retrouver. Et puis l'écriture est venue avec facilité parce que, en même temps, Tlemcen est une ville sainte et très inspirée par tous les saints qui y ont vécu.
On ne doit pas oublier bien sûr Mohammed Dib qui laisse ses souvenirs et une écriture fabuleuse sur sa ville. C'est un livre qui a été pour moi un grand bonheur. Ce livre m'a permis de rencontrer des Tlemcéniens absolument superbes qui me racontaient leur ville avec une ferveur sans égale, sans oublier la musique de Tlemcen qui m'a enchantée dont malheureusement je ne peux pas rendre compte dans ce livre. Je tiens juste à préciser avant de terminer, que ce livre sortira incessamment en arabe et en anglais.
Waciny laredj
Le livre Les ailes de la reine est sorti aux éditions Acte Sud à Paris il y a presque une année. Il a été très bien diffusé. On s'est battu pour avoir droit à l'édition algérienne. Pour moi, c'est très important. Ce n'est pas seulement une affaire de langue, c'est aussi un souci de lectorat. J'ai du respect justement pour le lectorat algérien. J'ai la nette conviction que ce lectorat est tellement riche qu'il faut le toucher. Habituellement, je le touche par le biais de la langue arabe mais aussi par le biais de la traduction. Et là, je tire vraiment chapeau à mon traducteur Marcel Bois qui est très connu. C'est un homme magnifique malgré son âge, malgré sa fatigue, il fait l'effort d'être dans l'actualité sur le plan littéraire. Ce roman parle de la décennie noire qui était très difficile et qu'on a vécue tous, en tant qu'Algériens, dans notre chair. On a perdu beaucoup d'intellectuels. Ce livre est un hommage à ces intellectuels. Il s'agit de l'histoire d'une danseuse de ballet qui a été interdite d'exécuter un grand poème d'amour intitulé Shahrezade. C'est un poème lyrique et en même temps symphonique, et elle va l'exécuter sous forme de ballet, mais elle va payer cher cette décision qui n'était pas facile. C'est bien d'être intellectuel quand on vit la vie en rose. En revanche, il est très difficile d'être intellectuel dans les moments les plus durs. C'est un peu ça, le message du livre. Meriem, la danseuse de ballet, va exécuter et va aller jusqu'au bout de ses convictions. Elle va payer cher ce choix. Elle va mourir assassinée. Ce livre est une manière de revisiter notre histoire moderne, disons contemporaine, et en même temps j'ai tenté de conjurer les stigmates laissés par cette période. A cette époque, on a perdu des écrivains tels que Abdelkader Alloula, Tahar Djaout, etc. C'est ma manière de rendre hommage à ces grands hommes. Le message, c'est aussi de dire aux gens que si l'on vit aujourd'hui dans un espace plus ou moins sécurisé c'est grâce à eux.
Yamile ghebalou-haraoui
Liban est un roman sur la guerre. L'objectif c'est de montrer que la guerre est aussi en nous.
Elle s'extériorise à travers l'aventure de trois personnes: Kamel et deux autres protagonistes. En même temps, il y a une quête de la part de ces protagonistes.
L'idée d'écrire un roman sur la guerre est venue du fait que nous étions dans une situation qui ressemblait à une guerre pendant longtemps. Elle ne peut pas ne pas laisser des traces sur nous parce que nous sommes en guerre contre nous-mêmes.
Nous le vivons assez mal. Ce livre constituait pour moi un moyen de parler de tous ces problèmes-là.
Fatima bakhai
Dounia, c'est l'histoire de l'entrée des Français à Oran, et en fait, c'est aussi l'histoire de la société oranaise en particulier et algérienne en général de 1827 à 1833 exactement.
J'ai pris trois années avant, et trois années après pour expliquer comment notre société s'est brutalement effondrée du fait de l'entrée de la colonisation française brutale et violente après 1830.
Tout ce que j'ai écrit avant, ce sont des romans historiques.
L'occupation de la ville d'Oran était un petit peu différente de celle de la ville d'Alger, mais ceci n'a rien de particulier, car un habitant de Annaba ou de Constantine va se retrouver.
C'est exactement la même chose. Mon but c'est d'expliquer comment nos valeurs et nos traditions ont été galvanisées.
Je le raconte évidemment à travers l'histoire d'une famille, pas modeste mais pas très riche, qui habitait l'Ouest algérien à cette époque-là.


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