Une nomination improbable est passée quasiment inaperçue dans le tsunami créé par l'affaire DSK, accusé aux Etats-Unis du viol d'une femme de chambre noire. Cette nomination concerne la présidence du Haut Conseil de l'IMA. L'IMA, c'est l'Institut du Monde arabe, dont la mission première est de faire connaître la culture et la civilisation arabes aux Français et par extension, au monde occidental en général. Son objectif, est-il indiqué dans son acte fondateur (1987), est «de développer la connaissance du monde arabe, d'animer une recherche en profondeur sur sa langue, ses valeurs culturelles et spirituelles, ainsi que de favoriser les échanges et la coopération, en particulier dans les domaines des sciences et des techniques, entre la France et le monde arabe, contribuant par là au développement des relations entre celui-ci et l'Europe». Cela suppose que ses gestionnaires, choisis conjointement par la France et ses 22 partenaires arabes, ont des connaissances pointues du Monde arabe, de sa culture, de sa langue, de ses différences et de sa complexité. En un mot, de sa civilisation et de son apport à la civilisation universelle. Cela suppose aussi que le postulant à la direction de cet Institut possède un bagage intellectuel élevé, connaît bien un monde dont il aura à défendre l'image auprès des Français et de l'Occident. Cela veut dire que cette personnalité est connue pour ses interventions sur le Monde arabe, par ses travaux sur une culture et une région qui ont beaucoup apporté au patrimoine mondial et, toutes choses égales par ailleurs, a eu à défendre le droit des Palestiniens à édifier leur Etat indépendant. Aussi, quelle ne fut pas la surprise d'apprendre la nomination, par le président français, Nicolas Sarkozy, du député UMP des Bouches-du-Rhône, Renaud Muselier à cette haute fonction. Surprise pourquoi? Rien en effet, ne justifiait la nomination de cette personnalité française, qui n'a aucune qualification pour postuler à cette fonction, nonobstant un CV impressionnant. La réalité est autre. Elle est bien amère lorsque l'on constate que les dirigeants français ont tendance à se servir de cette institution pour des raisons de basse politique, quand l'IMA devient un marchepied pour l'accession à des postes politiques plus valorisants. En nommant Renaud Muselier à la présidence de l'IMA, Nicolas Sarkozy voulait surtout préparer et rendre plus visible, une personnalité candidate à la relève, en 2014, de l'inamovible Jean-Claude Gauguin à la tête de la mairie de Marseille. C'est l'IMA et son statut qui sont ainsi pervertis. L'atterrissage de M. Muselier à l'IMA pose en fait problème. Outre l'incompétence du Monsieur pour tout ce qui est du Monde arabe, ce qui est encore plus grave est que M.Muselier est un «ami» déclaré d'Israël et un soutien zélé de sa politique de colonisation des territoires palestiniens occupés. A juste raison, l'IMA est, rappelle-t-on, au Quai d'Orsay, «un instrument essentiel et unique du dialogue entre la France et les pays arabes». Or, M.Muselier n'est pas la personne la plus qualifiée pour ce faire. Aussi, le choix de Renaud Muselier ne s'explique pas, d'autant plus qu'il intervient en pleine bourrasque des révoltes arabes, à un moment «primordial», précise-t-on encore à Paris «où nous souhaitons renforcer le dialogue et la compréhension avec les pays de cette région du monde». Dès lors, comment peut-on confier une telle mission à quelqu'un qui ne cache pas ses accointances avec les milieux sionistes, par son activité au sein du groupe d'amitié «France-Israël» au Parlement français? A ce que l'on sache, M.Muselier ne s'est pas signalé, se prévalant de son amitié pour Israël, par des prises de position courageuses sur le dossier palestinien. Alors, pour qui roule donc l'IMA? Sert-il le Monde arabe ou est-il le cheval de Troie de ses ennemis, lorsque l'on note que le président sortant, Dominique Baudis, est membre de l'Association «France-Israël». Que disent, que font donc les Etats arabes qui laissent passer de telles dérives?