Les affrontements entre police et manifestants réclamant la fin du pouvoir militaire ont fait quatre morts dimanche au Caire, portant à six le bilan des décès après deux jours d'affrontements en Egypte, à une semaine du premier scrutin législatif depuis le départ d'Hosni Moubarak. En début de soirée, des milliers d'Egyptiens occupaient la place Tahrir après avoir repoussé la police, tandis que les affrontements se poursuivaient dans les rues adjacentes à l'emblématique place, foyer de la révolte qui a provoqué le départ du président Moubarak en février, où un homme a péri samedi. Des médecins dans des hôpitaux de campagne installés sur la place Tahrir ont annoncé la mort de quatre personnes, dont trois morts par asphyxie après les tirs répétés de gaz lacrymogènes par la police et un par balle réelle. Une vidéo publiée sur YouTube a par ailleurs montré des policiers traînant le corps d'un manifestant avant de l'abandonner dans un caniveau, au milieu de détritus flottant dans une flaque d'eau. Des protestataires ont également défilé dans la ville d'Ismaïlia, sur le canal de Suez, selon une source des services de sécurité, tandis que des affrontements ont éclaté à l'issue des funérailles d'un jeune homme tué samedi à Alexandrie (nord), selon l'agence officielle Mena. A Suez, des militaires tiraient en l'air pour disperser des manifestants, au lendemain d'affrontements dans cette ville située sur la mer Rouge, selon les médiats. Des défilés réclamant que le pouvoir, aux mains de l'armée depuis plus de neuf mois, soit rendu aux civils, avaient également lieu dans le centre du pays à Qena et Assiout, selon des responsables de la sécurité. Quelque 55 personnes ont été arrêtées dimanche, selon la même source. Ces affrontements, rappelant les scènes de la révolte anti-régime du début de l'année, avec toutefois une moindre ampleur, ont débuté au lendemain d'une manifestation sur la même place de dizaines de milliers d'Egyptiens. Cette démonstration de force, menée par les islamistes, visait à réclamer le retrait d'une déclaration constitutionnelle présentée par le gouvernement, exemptant notamment le budget de l'armée de toute supervision parlementaire. L'armée a promis de rendre le pouvoir aux civils après l'élection d'un nouveau président. La date de la présidentielle qui doit suivre les législatives n'est toutefois pas encore connue, ce qui suscite de nombreuses craintes de voir les militaires s'accrocher au pouvoir. Ces troubles ont relancé les craintes que les législatives qui doivent débuter le 28 novembre et s'étaler sur plusieurs mois ne soient marquées par des violences. Le CSFA a dit «regretter» les événements actuels, appelant le gouvernement a rencontrer les forces politiques pour y mettre fin, tout en réaffirmant s'en tenir au calendrier électoral établi, qui prévoit le retour à un pouvoir civil après l'élection présidentielle, dans un communiqué lu dans la soirée à la télévision publique. Auparavant, le général Mohsen al-Fangari, membre du CSFA, avait assuré que les élections se tiendraient comme prévu. «Nous n'allons pas céder aux appels pour reporter le scrutin. Les forces armées et le ministère de l'Intérieur sont capables d'assurer la sécurité des bureaux de vote», a-t-il déclaré. Plusieurs personnalités politiques et des intellectuels, parmi lesquels l'ancien chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Mohamed ElBaradei, avaient publié un document demandant un délai supplémentaire pour ces élections, dans le cadre d'une révision du calendrier politique du pays. Ils proposent d'avoir d'abord une assemblée constituante, puis une élection présidentielle et enfin des législatives. Sur la place Tahrir, des groupes de manifestants scandaient des slogans hostiles au pouvoir militaire, réclamant la chute du maréchal Hussein Tantaoui, à la tête du CSFA. «Le Conseil des forces armées poursuit la politique de Moubarak, rien n'a changé après la révolution», a déclaré Khaled, 29 ans, alors qu'il installait une tente au centre de la place Tahrir. Dans l'après-midi, les forces de l'ordre ont détruit les campements au centre de la place. «Le sang des Egyptiens ne sera pas versé en vain» et «A bas Tantaoui», scandaient des manifestants à l'adresse de ce militaire septuagénaire, ministre de la Défense de M. Moubarak pendant vingt ans et l'un de ses plus proches collaborateurs. Parmi eux, un homme brandissait une pancarte couverte de sang. A l'étranger, les ministres italien et allemand des Affaires étrangères, Giulio Terzi di Sant'Agata et Guido Westerwelle, ont exprimé leur «profonde Préoccupation» face à cette situation et «invité toutes les parties à mettre un terme immédiatement aux actes de violences».