L'émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmad Al-Sabah, a dissous par décret hier le Parlement pour la quatrième fois en moins de six ans, à la suite de protestations sans précédent dans l'émirat du Golfe «En raison d'obstruction au progrès et de menace pour les intérêts supérieurs du pays, il a été décidé de revenir au peuple», a déclaré cheikh Sabah al-Ahmad Al-Sabah pour justifier la dissolution de la Chambre. Cette mesure est intervenue une semaine après l'acceptation par l'émir de la démission du Premier ministre, cheikh Nasser Mohammed al-Ahmad Al-Sabah, un éminent membre de la famille régnante, accusé par l'opposition de corruption. Le Mouvement progressiste (opposition libérale) s'est félicité de cette mesure et a réclamé dans un communiqué «des réformes politiques et constitutionnelles», sans lesquelles la crise persistera selon lui. En vertu de la loi koweïtienne, des élections législatives anticipées doivent être convoquées dans les 60 jours. Un deuxième décret est attendu pour fixer la date du scrutin. La semaine dernière, l'émir a nommé le ministre sortant de la Défense, cheikh Jaber Moubarak Al-Sabah, un autre membre de la famille régnante, au poste de Premier ministre. Ce dernier a présidé mardi un conseil des ministres et recommandé à l'émir de dissoudre le Parlement. Cheikh Nasser, 71 ans, avait démissionné après des manifestations conduites par des jeunes, soutenus par des députés de l'opposition, sur fond d'accusations de corruption et de mauvaise gestion des affaires publiques. Cette campagne en faveur de son limogeage, lancée en mars, s'est intensifiée en août après des accusations selon lesquelles une quinzaine de députés proches du gouvernement ont obtenu des virements illégaux sur leurs comptes bancaires, estimés par l'opposition à 350 millions de dollars. En septembre, le parquet avait ouvert une enquête sans précédent sur les comptes bancaires des suspects. Des députés de l'opposition ont boycotté l'élection en octobre de commissions parlementaires, affirmant leur refus de traiter avec des parlementaires soupçonnés de corruption. Et le 16 novembre, des centaines de jeunes et des députés de l'opposition ont pris d'assaut le Parlement après une violente manifestation, ce qui a conduit à l'arrestation de quelque 33 militants, remis en liberté la semaine dernière.