Les derniers évènements viennent montrer à tous que les urnes ne jouent qu'un rôle «sommaire» dans le partage du pouvoir au sein du sérail Il ne faisait aucun doute aux yeux des analystes et observateurs que les choses allaient s'accélérer dangereusement dès la rentrée sociale. Ils ne s'y sont guère trompés. Le pays, en effet, vient de vivre un de ses week-ends les plus mouvementés et les plus mémorables. Jeudi, les anti-Benflis ont enfin réussi à tenir leur rencontre, sous une très efficace protection policière. Ils en ont profité pour faire d'une pierre deux coups, mettant en place une instance transitoire chargée d'aller vers «le congrès du redressement du FLN», mais aussi mettant fin aux conflits qui opposaient Si-Affif à Hadjar en nommant à la tête de ce comité une vieux routier du doyen des partis politiques algériens, Abdelaziz Belkhadem. Le choix était loin d'être fortuit. L'homme, jouissant de statuts privilégiés et tant convoité de ministre d'Etat et de chef de la diplomatie, dispose d'un grand «capital politique» au sein des rangs du FLN, mais aussi auprès de nombreuses chancelleries. Nul doute que cette nomination risque de provoquer quelques remous chez les fidèles de Ali Benflis. Ces derniers, en décrétant ouverte la session ordinaire de leur comité central, «entendent réagir au quart de tour à tout nouveau rebondissement dans une affaire tendant à s'accélérer chaque jour un peu plus». Ce n'est de la sorte pas le fruit du hasard si quelques heures plus tard, le chef de l'Etat, c'est-à-dire dans la soirée de vendredi, le président a procédé à un remaniement ministériel dans lequel les cinq ministres fidèles au secrétaire général du FLN ont été «remerciés». Le coup est difficilement supportable pour une formation politique, la première du pays, qui sort à l'instant d'un terrible bras de fer institutionnel à la suite du discours très controversé de Karim Younés, président de l'APN, à l'occasion de l'ouverture de la session d'automne de la chambre basse du parlement algérien. Quelques heures plus tard, le président du sénat, cadre du RND, devait y répondre alors que le lendemain, le président du groupe parlementaire du parti de Ahmed Ouyahia traçait les «lignes rouges» à ne pas franchir afin de ne pas dévoyer les activités parlementaires au profit des conflits partisans. Le RND, qui a longtemps attendu sa revanche sur le sort, a enfin tenu le bon filon à la faveur du conflit qui mine le FLN et du besoin qu'a éprouvé le président de «stabiliser» les institutions étatiques. C'est donc tout naturellement que la balance a penché en faveur du RND à la suite de ce nouveau remaniement ministériel qui, désormais, accorde la part belle au parti que dirige l'actuel chef du gouvernement. La question que se posent à présent les observateurs a trait au comportement qu'aura dès lors le groupe parlementaire du FLN au sein de l'APN. Celui-ci, rappelons-le, jouit d'une majorité absolue au sein de cette assemblée et peut, par conséquent, bloquer toutes les lois que se proposerait de mettre en chantier le gouvernement d'obédience RND. Il peut également mettre des bâtons dans les roues de l'Exécutif, comme cela a été le cas, notamment, à la suite de la saisine officielle de Ahmed Ouyahia sur les récentes mesures de suspension arbitraires de six titres de la presse algérienne, parmi les plus importants et les plus lus. Mais le risque est grand de voir le président prendre la décision de dissoudre l'assemblée et aller vers des législatives anticipées. Le RND, qui n'attend que cette occasion, en profiterait pour «grignoter» de nouveaux terrains cédés au parti de Benflis au moment où le président du sénat ne s'est pas gêné pour annoncer le renouvellement d'une partie de la composition du sénat au profit indubitable de son parti. Benflis, qui a sans doute autant de tours dans son sac, n'a pas non plus dit son dernier mot. Compte tenu du fait que les événement continueront d'aller en s'accélérant jusqu'à la dernière ligne droite d'avril 2004, il ne fait guère de doute que nous assisterons encore à pas mal de «spectacles» avant que la décantation définitive ne se soit enfin opérée. Qui vivra verra!