Après tout, la modernité n'est pas une question d'appareils pour peu que celui qui s'en serve le soit. Les chèques postaux, cette banque du pauvre gérant des milliers de comptes viennent d'innover. Ils ont introduit le service vocal. La mesure prise est accueillie avec soulagement par tous les usagers. Les chaînes devant les centres payeurs pour s'enquérir des avoirs appartiennent au passé. Il suffit de composer le 1530 et la voie métallique vous guide pas à pas et, enfin, vous renseigne sur votre avoir. Mais, car il y a un mais, c'est là où les choses se corsent. Un usager des postes, retraité de son état, est venu nous conter sa mésaventure. L'homme est partagé entre la colère et l'indignation. Très irrité, il nous narre son histoire. «Attendant une rentrée d'argent, j'ai décidé de faire appel au serveur vocal des chèques postaux. Les chaînes devant les centres de paiement m'ont dissuadé d'avoir recours aux guichets. Combien grande fut ma surprise, quand après voir bien suivi les instructions de la voix métallique, je me vois crédité d'une certaine somme, celle du montant de ma pension de retraite, et ce, sept jours après le retrait de cette dite somme. Mon premier réflexe est de me dire que ça y est, la somme attendue est bien entrée dans mon compte. Surpris, je décide d'attendre le lendemain, et avant de me présenter au centre payeur pour retirer cet argent, je vérifie une seconde fois, par l'intermédiaire du serveur vocal mon avoir. La même voix me crédite toujours de la première somme annoncée la veille. Arrivé au guichet du centre payeur, et après avoir mûrement réfléchi, je décide de faire une demande d'avoir. C'est là que l'on m'annonce que mon avoir finalement est celui que j'attendais, défalqué de la somme annoncée par le serveur vocal. Heureusement que j'ai pris mes précautions, sinon je me serais exposé à des ennuis avec les chèques postaux...» Devant notre crédulité face à une telle histoire, notre homme nous propose de vérifier ses dires par nous-mêmes. Il prend la précaution de nous préciser son avoir réel. On compose donc le 1530 et on laisse le vieux monsieur continuer la suite des opérations. D'abord, le serveur lui demande: «Tapez votre numéro d'identification, SVP», ce qu'il fit, sans résultat. A l'autre bout du fil, la voix reprend: «Ce numéro n'est pas valide». L'on vérifie, le numéro introduit est bien celui du retraité. On décide de raccrocher et de recomposer le 1530. Cette fois, la chance nous sourit, le serveur vocal donne le montant de l'avoir. «Au (jour) septembre, votre avoir est de....DA» ! La somme annoncée est celle qui a presque induit en erreur notre vieux retraité. Ce dernier, philosophe, dira: «Après tout, la modernité n'est pas une question d'appareils. On peut être au fait du modernisme même avec un simple stylo, à condition que celui qui s'en sert le soit...». Et avant de nous quitter, il conclut: «Il vaut mieux avertir les lecteurs. Il ne faut pas faire trop confiance au service vocal.» Autant dire que la chaîne devant les guichets des centres payeurs a encore de beaux jours devant elle ! Et ce n'est pas avec ce genre d'erreurs que les chèques postaux regagneront auprès des usagers la place qui était la leur, il n'y a pas si longtemps...