Bouteflika et Marzouki lors de sa dernière visite en Tunisie Le développement des zones frontalières est choisi par la Tunisie pour devenir le socle de la coopération avec l'Algérie. Le président tunisien, Moncif Al Merzouki a confié à El Khabar qu'il sera en visite à Alger dès février prochain. Il considère que des liens unissent son pays avec l'Algérie. Cela ne l'empêche pas de révéler que 15.000 Algériens résidant en Tunisie sont confrontés à de nombreux problèmes et qu'il a donné instruction aux ministres de la Justice et de l'Intérieur pour les régler. Moncif Al Merzouki a saisi l'occasion de l'entretien qu'il a accordé à El Khabar pour rappeler l'exemplarité des relations entre les deux peuples algérien et tunisien à laquelle, dit-il, l'ex-président tunisien Ben Ali a porté atteinte. Il a notamment rappelé comment les Algériens étaient maltraités en Tunisie à l'époque Ben Ali, avant d'enchaîner que parmi les acquis de la révolution tunisienne, l'amélioration des relations entre les deux peuples et Etats et que sa visite en Algérie s'inscrit dans ce cadre. Le président estime que l'Algérie a eu une position honorable lors de la révolution car elle n'a pas tenté d'influer sur son cours. Marzouki attend de l'Algérie un soutien moral et un développement commun. Il a abordé le dossier des zones frontalières entre les deux pays en disant qu'elles sont les plus pauvres. Ces zones peuvent constituer une occasion pour une coopération réelle, a-t-il souhaité. Il y voit comme l'ébauche de la construction du Maghreb arabe à laquelle il se dit très attaché. A propos du dossier de l'UMA, il a émis son souhait que l'Algérie réponde positivement à l'initiative visant à redonner vie à l'espace maghrébin à travers un sommet maghrébin qui se tiendra incessamment. Le président Marzouki a formulé le voeu que ce sommet soit organisé en Tunisie. Il constate que cette construction se heurte au conflit marocain avec le Sahara occidental, que Marzouki souhaite voir résolu par l'ONU. Le président tunisien a abordé les autres conflits dans le Monde arabe. Marzouki s'est dit opposé à une intervention étrangère en Syrie, jugeant que cette ingérence serait un suicide et conduirait à une implosion de tout le Moyen-Orient. Il évoque ce spectre suicidaire en parlant de l'éventualité d'une intervention étrangère pour mettre fin à la répression de la contestation du régime du président Bachar al-Assad, qui a déjà fait plus de 5000 morts, selon l'ONU. Une telle intervention signifierait que la guerre va s'étendre à toute la région, ce qui ouvre la voie à toutes les puissances, à l'instar de la Turquie, d'Israël, de l'Iran et du Hezbollah. Cela voudrait dire que toute la région va exploser, a ajouté le président tunisien. L'émir du Qatar s'est dit, quant à lui, favorable à l'envoi de troupes arabes en Syrie afin de mettre fin à la tuerie dans le pays, secoué depuis dix mois par une révolte populaire réprimée dans le sang, la première prise de position de ce type d'un dirigeant arabe. Evoquant la Libye dont le régime est tombé l'an dernier, le président tunisien dit que le pays a accepté l'intervention étrangère quand la situation a atteint des proportions alarmantes. «Nous l'avons accepté mais sans conviction», a-t-il souligné. Le président s'est inquiété de l'évolution de la situation en Syrie qui évolue vers un conflit entre courants religieux du fait que la révolution commence à prendre un caractère confessionnel, d'où le grand danger. Dans le cas où les divergences et les oppositions interconfesionnelles persistaient, la révolution va échouer, dans ce cas-là, ça serait un drame, estime le dirigeant tunisien. Le chef d'Etat tunisien a réaffirmé les très bonnes relations avec l'Arabie Saoudite tout en réclamant l'extradition de Ben Ali. Il espère que Riyadh comprenne que la demande de remettre Ben Ali est un droit légitime du peuple tunisien, puisque l'Islam n'admet pas d'accueillir les tyrans qui ont combattu la religion et fait couler le sang des musulmans. Au plan interne, le président s'est attardé sur ses relations avec le Premier ministre, Hamadi Djebal, issu d'Ennahda. Il le qualifie d'ami de trente ans avec lequel il prend son dîner tous les mardis. Des lignes ont été tracées avant l'instauration de la coalition. Il s'agit du respect des libertés publiques et privées. Marzouki ne veut ni un Etat laïc ni un Etat théocratique mais un Etat civil. En somme, une République dans laquelle le voile intégral peut très bien cohabiter avec la minijupe.