Au vu du bilan dressé par le premier argentier du pays, l'Algérie ne connaît pas de crise économique et sociale. «La future réunion du Conseil de la monnaie et du crédit, nouvelle version (Conseil dans lequel est présent le ministère des Finances par deux représentants) sera plus importante que le Conseil des ministres.» C'est par cette phrase révélatrice des potentielles décisions qui pourraient alors être prises dans le secteur, que le ministre des Finances, M.Abdellatif Benachenhou, a clôt sa conférence de presse organisée hier dans les locaux flambant neuf du siège de son département. Auparavant et comme l'avait fait précédemment son chef hiérarchique, Ahmed Ouyahia, le premier argentier du pays a dressé à l'assistance un tableau chiffré «apaisant» relatif à l'évolution de la situation économique et financière du pays. Contrairement au sentiment de sinistrose et de mécontentement qui règne parmi les pans entiers de la société algérienne, le ministre des Finances, chiffres à l'appui, a laissé entendre que les paramètres économiques de la maison Algérie sont presque tous au vert. «Une progression significative de la croissance économique depuis 1999 et qui serait de l'ordre de 6,5% cette année, un volume d'investissement global qui n'a pas cessé d'augmenter atteignant les 1262 milliards de DA pour 2003 alors que le pays investit annuellement pas moins de 15,5 milliards de dollars et un revenu disponible des ménages algériens qui est passé de 1815 milliards de DA en 1999 à 2332 milliards de DA en 2002, soit 6,2 milliards de dollars», sont les données fondamentales sur lesquelles s'est basé M.Benachenhou pour traduire son optimisme, sinon sa quiétude. Détaillant ses explications, il a considéré également que le revenu par tête a augmenté durant cette période de 5% en moyenne et en termes réels, c'est-à-dire en dehors de l'inflation. Evacuant d'un revers de la main tous les conflits sociaux actuels et la montée au créneau des revendications salariales de plusieurs secteurs de la vie économique et sociale du pays, le premier responsable des finances nationales a estimé qu'il y a ce qu'il a appelé «un dynamisme salarial incontestable», clamant même au passage, que «le pouvoir d'achat des Algériens a progressé», en se basant sur le fait que le Snmg a été multiplié par deux fois et demi depuis 1995. Néanmoins dans toute son analyse, le ministre a occulté, volontairement ou pas, une donnée fondamentale de la situation économique algérienne: le taux de chômage. Ce n'est que lors des débats et répondant à une question sur le sujet que le conférencier a abordé le thème en demandant les chiffres y afférant à l'un de ses collaborateurs.Et à l'entendre, le taux de chômage en Algérie «a reculé et il serait de l'ordre de 27% seulement», chiffre arrêté à novembre 2002 et de ce fait il faudrait attendre, selon lui, les données de l'Office national des statistiques pour en être correctement fixé sur le sujet. Idem pour la pauvreté dans le pays qui serait beaucoup plus «rurale et territoriale que générale» même s'il y a selon lui quelques «poches» de misère dans les villes ou les chefs-lieux de wilayas riches. Le reste de la conférence de presse a été consacré aux détails relatifs à la fiscalité, aux dépenses publiques, aux transferts sociaux, aux équilibres et à l'endettement interne et externe du pays. Ce dernier atteindrait selon le ministre des Finances, les 22 milliards de dollars cette année et aurait connu, d'après lui, une diminution d'un tiers depuis 1996 quand la dette extérieure du pays était de 33 milliards de dollars. Enfin, à la question de savoir la raison d'être de la visite d'une délégation du FMI en Algérie ces derniers jours, M.Benachenhou a indiqué que cette mission avait deux préoccupations: «Constater les progressions de l'économie algérienne et s'enquérir du secteur bancaire, noyau institutionnel de la croissance.» Il est vrai, comme l'a reconnu le ministre, que le «séisme» provoqué par l'affaire d'El Khalifa Bank «est une leçon de choses» cinglante reçue par le gouvernement algérien et une partie des citoyens, qui attendent toujours la sanction des auteurs de cette «escroquerie du siècle».