Le texte pérennise l'hypercontrôle du chef de l'Etat sur l'institut d'émission. Le nouveau texte relatif à la monnaie et au crédit, concocté en catimini, reprend la quasi-totalité des articles de la loi version Benachenhou. La plus importante modification est la disparition de l'article 192 de celle de 1990, qui spécifie que les transferts des secteurs hydrocarbures et mines doivent passer par la Banque centrale. L'article 131 de la version Benachenhou, celle qui a cours actuellement, reproduit entièrement cette disposition. Il disparaît curieusement dans la nouvelle mouture de la loi sur la monnaie et le crédit. À la place, on retrouve un article du chapitre sanctions pénales : quiconque aura été condamné en vertu de l'article précédent pour infraction à l'article 81 de la présente loi (par exemple, violation de la législation des changes) ne pourra exercer, à quelque titre que ce soit, dans une banque ou établissement financier dans lequel il exerçait ses fonctions ou dans toute filiale desdits banques ou établissements financiers. En cas d'infraction à cette interdiction, le délinquant et son employeur seront punis des peines de l'escroquerie. Le nouveau texte durcit les sanctions pour entrave au travail de la commission bancaire. L'article 132 énonce que tout administrateur, tout dirigeant de banque ou d'établissement financier qui, après mise en demeure, ne répond pas aux demandes d'information de la commission, qui met obstacle de quelque manière que ce soit, à l'exercice par celle-ci de sa mission de contrôle ou qui lui communique sciemment des renseignements inexacts, est passible d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende au moins égale à 3 millions de dinars. La sanction dans la loi actuelle est de six mois d'emprisonnement et une amende de100 000 à 500 000 dinars. Le durcissement des peines semble être lié aux effets de l'affaire El Khalifa Bank. Nouveauté : un comité mixte Banque d'Algérie-ministère des Finances est chargé de définir et de superviser la mise en œuvre de la stratégie d'endettement extérieur ainsi que de la politique de gestion des avoirs de la dette extérieure. Il est composé de deux membres nommés respectivement par le gouverneur et le ministre des Finances (article 128). L'article 30 est plus précis. Le gouverneur devra remettre, outre le bilan, les comptes de résultat et le rapport sur les opérations et activités de la Banque d'Algérie à la clôture de chaque trimestre, annuellement, au président de la République, avec communication au Chef du gouvernement, deux rapports, le premier sur la gestion des réserves de change, le second sur la gestion de la dette extérieure incluant une analyse sur la situation et les perspectives de la solvabilité externe de l'économie. Par ailleurs, le Conseil de la monnaie et du crédit conserve, dans la nouvelle mouture, les prérogatives d'autoriser l'ouverture d'une banque, d'un établissement financier et d'une succursale de banque étrangère. Il convient de signaler que la disposition selon laquelle le chef de l'Etat peut relever le gouverneur et le vice-gouverneurs est supprimée. Mais le contrôle du chef de l'Etat et du ministre des Finances sur la Banque d'Algérie est pérennisé. Le gouverneur et les trois vices-gouverneurs sont tous nommés par le chef de l'Etat. Le conseil d'administration de la banque est composé, outre du gouverneur et des trois vices-gouverneurs, de trois fonctionnaires désignés par le président de la République en raison de leur compétence en matière économique et financière, sur proposition du ministre des Finances. Enfin, en dépit de la disparition de l'article 131, synonyme de voie ouverte à l'absence de contrôle des exportations et des transferts de Sonatrach et, partant, aux détournements des richesses nationales, le gouvernement Ouyahia vient de donner son feu vert (lire encadré) à la nouvelle loi sur la monnaie et le crédit sans aucune explication sur la suppression de ce garde-fou. N. R. Le texte adopté en Conseil de gouvernement le conseil de gouvernement, réuni hier, a examiné et endossé un avant-projet d'ordonnance relative à la loi sur la monnaie et le crédit, présenté par le ministre des Finances. La révision de la loi sur la monnaie et le crédit répond au souci d'accompagner l'ouverture croissante de l'économie et la liberté de commerce, lesquels exigent une plus grande cohérence dans la politique monétaire, bancaire et financière à même de garantir les équilibres internes et externes de l'ensemble des agents économiques. Les derniers évènements qu'a vécus notre pays dans le domaine financier ont révélé et mis à jour des dérèglements et des imperfections graves concernant les dispositifs de contrôle et de transparence des activités de certains établissements financiers. De telles dérives exigent une révision de la législation relative aux aspects institutionnels, réglementaires et de procédures régissant le secteur financier, pour mieux les adapter aux réalités nationales et renforcer la sécurité financière du pays. Les principaux objectifs poursuivis par les amendements proposés portent ainsi sur : a)- un meilleur exercice des prérogatives de la Banque centrale à travers : - la séparation entre le conseil d'administration et le conseil de la monnaie et du crédit, - l'élargissement des prérogatives du CMC, - l'établissement d'un censorat chargé du suivi des activités de la banque, - le renforcement de la commission bancaire et son indépendance. b)- le renforcement de la concertation entre la Banque d'Algérie et le gouvernement par : - l'institution de rapports périodiques transmis aux différentes institutions de l'Etat, - la création d'un comité mixte Banque d'Algérie-ministère des Finances, - l'élargissement des moyens budgétaires de l'Etat par une gestion active des réserves et de la dette publique interne et externe, - la fluidification de la circulation de l'information et une meilleure sécurisation financière.