Les rebelles touareg et groupes armés islamistes qui contrôlent depuis samedi la ville de Gao, dans le nord-est du Mali, y ont perpétré de «graves violations des droits de l'homme», a affirmé hier la junte militaire. «Les populations du Nord-Mali, singulièrement celles de Gao, subissent de graves violations des droits de l'homme» depuis «l'invasion des combattants MNLA (rébellion touareg), Ansar Dine (groupe islamiste) et Aqmi (Al Qaîda au Maghreb islamique)», affirme un communiqué de la junte. «Les femmes et les filles sont enlevées puis violées par les nouveaux occupants qui y dictent leur loi», ajoute ce communiqué, signé du porte-parole de la junte militaire, le lieutenant Amadou Konaré. Le texte ne fournit aucun autre détail, notamment sur l'ampleur de ces viols. La junte dénonce également «la restriction de la liberté d'aller et venir déniée aux populations dans les localités de Kidal», ville conquise le 30 mars, «et Gao où les éléments Mnla, Ansar Dine et Aqmi bloquent tout mouvement des moyens de transport, fussent-ils civils». Le Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'Etat (Cnrdre) «en appelle aux organisations et organismes internationaux, singulièrement l'ONU et la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) pour une conjugaison des efforts en vue de condamner ces crimes et leurs auteurs». «Dans tous les cas, ces graves violations des droits de l'homme interpellent la conscience collective», conclut le communiqué. Profitant du putsch à Bamako contre le président Amani Toumani Touré le 22 mars, les rebelles touareg et des groupes islamistes ont pris en fin de semaine le contrôle des trois capitales du Nord malien Kidal, Gao et Tombouctou, coupant de fait le pays en deux. Interrogé au téléphone depuis Bamako, un habitant de Gao, s'exprimant sous couvert d'anonymat, a déclaré: «C'est une réalité, ici. La nuit, ils enlèvent des femmes, ils les emmènent, ils les violent», a affirmé cet habitant, assurant avoir connaissance d'une «dizaine de cas au moins» depuis le 31 mars, date de la prise de Gao par les rebelles. La même source a dénoncé les «pillages» et «saccages». Sur un autre plan, l'Union africaine (UA) a adopté mardi soir des sanctions contre les membres de la junte qui a pris le pouvoir le 22 mars au Mali et contre les groupes armés touareg et islamistes ayant pris le contrôle du nord du pays, a annoncé un responsable de l'UA. La commission de l'UA va établir la liste des individus concernés en coopération avec la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui a décidé lundi d'un «embargo total» sur le Mali, a précisé le commissaire de l'UA en charge de la paix et de la sécurité, Ramtane Lamamra, à Addis Abeba. Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'UA a décidé «d'imposer avec effet immédiat des mesures individuelles, parmi lesquelles une interdiction de voyager et le gel des actifs, contre le chef et les membres de la junte militaire», a déclaré M. Lamamra à la presse, à l'issue d'une réunion du CPS dans la capitale éthiopienne. Ces sanctions concernent également «tous les individus et entités qui contribuent d'une façon ou d'une autre au maintien du statu quo anticonstitutionnel», a-t-il ajouté. Les mêmes sanctions s'appliquent «aux dirigeants et membres des groupes armés et rebelles dans le nord du Mali», a poursuivi le responsable de l'organisation panafricaine.