Le programme «Alban» a pour objectif d'accompagner 1 000 éleveurs algériens La production laitière souffre d'un manque flagrant de fourrage. Le contrat de trois ans liant l'Algérie à Bretagne International-BI pourrait s'étaler sur 10 à 15 ans, a indiqué dimanche à Alger, un responsable de ce groupe, ajoutant qu'il devrait toucher tout les bassins laitiers. Il a rappelé que ce projet, qui vise le développement et la modernisation de la filière lait, est opérationnel depuis février 2012. La concrétisation de cet accord s'est matérialisé avec la mise en place d'un programme de développement dénommée «Alban», touchant trois wilayas de l'ouest, du centre et de l'est du pays: (Blida, Relizane et Souk Ahras). «Le contrat est tacitement renouvelable», a indiqué à la presse le directeur de Bretagne International (BI), Marc Gillaux, en marge d'un symposium international sur la filière lait, organisé dans le cadre du Salon international de l'agriculture, de l'élevage et de l'agroalimentaire (Sipsa-Agrofood) qui se tient du 19 au 22 mai au Palais des expositions à Alger. L'objectif est d'accompagner techniquement «plus de 300 éleveurs par wilaya, augmenter de 50% la production moyenne par vache et multiplier par trois leur nombre actuel par unité d'exploitation ainsi que l'augmentation de leur rendement en trois ans (2012-2014).» Le programme «Alban» a pour objectif d'accompagner 1000 éleveurs algériens en trois ans dans les trois wilayas pilotes. Des actions prioritaires ont été identifiées dont l'alimentation rationnelle des cheptels, l'hygiène et la qualité du lait produit. L'extension de ce programme aux «22 bassins laitiers identifiés» à l'échelle nationale, dépendra des résultats du projet pendant ces 3 ans et des objectifs du ministère de l'Agriculture et l'Institut technique de élevages (Itelv). «Alban» compte faire adhérer 1000 éleveurs pendant la première phase du projet auquel BI apporte son expertise à travers l'appui technique et la formation de formateurs, et constituer des groupes d'appui aux éleveurs (Galep). Ce projet répond aux enjeux stratégiques de moderniser la filière lait, de réduire les importations de poudre de lait et créer des emplois. Pour BI, ce programme devrait créer des relations d'affaires avec les entreprises bretonnes en leur ouvrant de nouveaux marchés. Le comité de pilotage du projet a été installé en mai 2011 en application du protocole d'accord signé en février de la même année entre l'Itelv et l'association BI, rappelle-t-on. Son coût est estimé à près de 6 millions d'euros, dont 500 millions de DA seront mobilisés par la partie algérienne et 750 000 euros par la partie française. Le président du Conseil interprofessionnel du lait (CIL), Mahmoud Benchekor, a pour sa part averti que «la production laitière nationale ne pourra pas se développer sans l'augmentation de la production fourragère». C'est un «élément clé pour atteindre l'autosuffisance en lait et sur lequel l'Etat devrait se pencher et trouver des mécanismes d'aide aux agriculteurs», a estimé ce responsable. «Pour produire du lait, il faut d'abord produire des fourrages», a-t-il insisté, et de poursuivre: «si on n'assure pas une bonne alimentation, saine et équilibrée au bétail, nous ne pourrons pas maîtriser les autres facteurs de production, tel que la santé animale». Ce responsable, qui s'exprimait en marge d'un symposium international sur la filière «lait et process» organisé en marge du Sipsa-Agrofood, a révélé que «nous avons un grand déficit en fourrages pour l'alimentation du cheptel, tout types confondus». Pendant plus de 30 ans, l'Algérie importait des vaches laitières à haut potentiel génétique, qui produisent dans leurs pays plus de 6000 litres de lait par lactation, alors que la moyenne nationale n'a jamais dépassé les 3500 litres par lactation. Pour lever cette contrainte, les pouvoirs publics devraient, à son avis, mettre à la disposition des agriculteurs des ressources hydriques nécessaires en mobilisant l'eau des barrages et celle issue du recyclage dont l'Algérie ambitionne de récupérer plus de 600 millions/m3 à l'horizon 2014. Afin de permettre l'ancrage des éleveurs professionnels et leur stabilisation dans la filière, l'Etat devrait accorder des aides «attractives» s'étalant sur une longue durée, recommande M.Benchekor. Le coût à l'hectare irrigué au goutte-à-goutte est estimé à 60.000 DA, ce qui grèverait le coût à la production du kilogramme d'ensilage, alors que l'Etat n'accorde que 6000 DA/ha de soutien aux cultures fourragères. Selon lui, 250.000 à 300.000 ha irrigués pourront produire suffisamment de fourrages pour nourrir 1,5 million de vaches laitières, ce qui donnera l'équivalent de 7 milliards de litres à raison de 6000 litres par lactation par an. Les besoins de l'Algérie en produits laitiers sont évalués à 5 milliards de litres équivalent en lait par an dont 1,6 milliard de lait en liquide, produits actuellement à base de lait cru et de poudre. Le soutien des pouvoirs publics pour la production fourragère «s'avère aujourd'hui impérative vu l'intérêt exprimé par quelques opérateurs sur le terrain», estime encore cet éleveur. Pour sa part Soukhal, expert et membre de la Fondation «Filaha Innove», «le maïs fourrager et la luzerne sont les deux cultures principales qu'il faut développer et accompagner. Nous devons mettre le paquet sur ces cultures et trouver des mécanismes d'aide de l'Etat qui permettent de créer un système économique de production et de conservation des fourrages», a-t-il recommandé. Les experts intervenant lors de ce symposium ont beaucoup insisté sur l'alimentation, l'hygiène de l'élevage et la conduite du troupeau. Mais, l'alimentation reste le facteur principal, a indiqué le directeur général de BI, Marc Gillaux. Enfin, selon ces experts, l'état actuel des étables en Algérie «est loin de réunir les conditions pour des rendements dignes d'exploitations compétitives».