Le dépouillement des bulletins de vote, dont le résultat sera annoncé aujourd'hui, se poursuivait hier Les résultats officiels du scrutin présidentiel égyptien ne seront connus qu'aujourd'hui. Il est clair cependant qu'un second tour aura lieu qui, dans une large mesure, opposera l'islamiste Morsi au général Chafiq. Les Frères musulmans ont appelé vendredi soir les Egyptiens à faire front derrière leur candidat Mohammed Morsi au second tour de la présidentielle afin de «sauver la révolution», mise en danger selon eux par la possible victoire d'Ahmed Chafiq, une des figures du régime Moubarak. La confrérie a estimé dans la soirée qu'au vu des «chiffres complets» du premier tour dont elle avait connaissance, il était «absolument clair» que les deux hommes se retrouveraient au second, les 16 et 17 juin. Elle a précisé que M.Morsi avait recueilli 25,3% des suffrages et M.Chafiq 24%. Ce duel Morsi-Chafiq n'a toutefois pas été confirmé par la commission électorale, qui doit annoncer les résultats officiels du premier tour à partir d'aujourd'hui. Un haut responsable des Frères, Essam el-Erian, a vivement attaqué vendredi soir M.Chafiq, le dernier Premier ministre de M.Moubarak, affirmant lors d'une conférence de presse que son élection mettrait «la nation en danger». «La révolution est en danger. Nous avons besoin d'un pays démocratique. Chafiq est contre la démocratie», a-t-il ensuite déclaré. Il a précisé que M.Morsi appelait les candidats éliminés au premier tour à une réunion hier afin de «sauver la révolution», en référence à la chute du régime de M.Moubarak en février 2011. Un porte-parole de l'équipe de campagne de M.Chafiq, Karim Salem, a nié que leur candidat menaçait les objectifs de la révolte. «Non, l'ère (Moubarak) est terminée, la politique a changé. L'Egypte entre dans la démocratie», a-t-il dit, avant les attaques lancées dans la soirée par la puissante confrérie islamiste. De son côté M.Chafiq a déclaré hier «Je promets à tous les Egyptiens que nous allons commencer une ère nouvelle. Il n'y aura pas de retour en arrière. Ce qui est passé appartient au passé» «Il n'y a pas de place pour un retour à l'ancien régime. La roue du temps ne reviendra pas en arrière», a-t-il encore promis. Les sites Internet de plusieurs journaux donnaient également dans la soirée d'hier MM. Morsi et Chafiq en tête dans un mouchoir de poche à l'issue du premier tour qui s'est tenu mercredi et jeudi. Le grand quotidien indépendant al-Masry al-Yom leur attribuait respectivement 24,9% et 24,5% des voix, suivis avec 21,1% par un candidat de la gauche nationaliste arabe, Hamdeen Sabbahi, sur la base de résultats quasi-définitifs obtenus dans les centres de dépouillement. Deux candidats longtemps donnés parmi les favoris, l'ancien chef de la Ligue arabe, Amr Moussa et l'islamiste modéré Abdel Moneim Aboul Foutouh, sont donnés battus. M.Aboul Foutouh a affirmé vouloir désormais faire barrage à M.Chafiq. Considéré comme «le candidat de rechange» des Frères après l'élimination par la commission électorale de leur premier choix, Khairat al-Chater, M.Morsi a bénéficié de la machine électorale et de la base militante de la confrérie. Les Frères, officiellement interdits pendant plus de 50 ans en Egypte et bête noire du régime Moubarak, étaient déjà arrivés largement en tête aux récentes législatives. Ahmed Chafiq a pour sa part axé sa campagne sur la sécurité et la stabilité, afin de rallier les Egyptiens exaspérés par les remous politiques et la dégradation de la situation économique depuis la révolte. Dès le premier tour, MM. Morsi et Chafiq sont apparus en franche opposition et leur confrontation au second tour pourrait gravement diviser le pays. L'ancien Premier ministre est abhorré par les partisans de la «révolution», pour qui son éventuelle victoire signifierait la mort de leurs idéaux. Les détracteurs de M.Morsi le considèrent pour leur part comme soumis à la confrérie et à sa vision islamique très conservatrice de la société aux dépens des intérêts du pays. «La chose importante, c'est que les élections étaient propres», soulignait néanmoins un électeur, qui avait voté Aboul Foutouh et optera au prochain tour pour M.Morsi pour ce scrutin présidentiel pluraliste, au résultat pour la première fois non connu d'avance.