[Les Egyptiens devaient choisir, hier et avant-hier, entre l'islamiste Mohamed Morsi et Ahmed Chafiq issu de l'armée]Les Egyptiens devaient choisir, hier et avant-hier, entre l'islamiste Mohamed Morsi et Ahmed Chafiq issu de l'armée Les bureaux de vote ont ouvert en début de matinée pour la seconde journée du deuxième tour. Les résultats doivent être proclamés officiellement le 21 juin, mais pourraient être connus avant. Les Egyptiens votaient, hier pour le dernier jour de l'élection présidentielle qui oppose un ancien haut dirigeant de l'ère Moubarak et un candidat des Frères musulmans, dans un climat de vive confrontation entre l'armée au pouvoir et le puissant mouvement islamiste. Les bureaux de vote ont ouvert en début de matinée pour la seconde journée du deuxième tour. Les résultats doivent être proclamés officiellement le 21 juin, mais pourraient être connus avant. «Le moment de vérité approche», titrait le journal gouvernemental al-Gomhouria, dans un pays profondément divisé entre partisans du candidat Ahmed Chafiq, dernier Premier ministre de Hosni Moubarak, issu de l'appareil militaire, et un haut responsable des Frères musulmans, Mohammed Morsi. «L'armée aura toujours Tahrir face à elle. Nous sommes prêts à reprendre la révolte», affirmait Marwan, un instituteur de trente ans sur la place emblématique de la contestation qui a chassé en février 2011 le président Hosni Moubarak du pouvoir. «M.Chafiq est l'homme qui convient à ce stade de la vie du pays. Il nous faut de la tranquillité et de la stabilité», déclarait à l'inverse Osmane, un fonctionnaire de 55 ans. La climat de confrontation est monté d'un cran avec l'annonce officielle samedi, en plein milieu du second tour, de la dissolution du Parlement par le Conseil suprême des forces armées. La décision a été prise en application d'un arrêt de la Haute cour constitutionnelle jeudi, annulant l'élection des députés au motif d'un vice juridique dans le mode de scrutin des législatives tenues par étapes de novembre 2011 à janvier 2012. Les Frères musulmans, désormais privés d'une institution où ils disposaient de près de la moitié des sièges, ont vivement réagi, en fustigeant «la volonté du Conseil militaire de s'emparer de tous les pouvoirs». Le parti de la liberté et de la justice, PLJ, émanation de la confrérie, a dénoncé dans cette dissolution «une agression flagrante contre la révolution». Les Frères musulmans, dont certains dirigeants ont dénoncé un «coup d'Etat» institutionnel orchestré par les généraux, réclament que la question de la dissolution du Parlement soit réglée par un référendum. Seize mois après la chute de M.Moubarak, le prochain président, à qui l'armée promet de remettre le pouvoir d'ici la fin du mois, fera face à une situation économique préoccupante et de graves incertitudes politiques. «Le chef de l'Etat entrera dans le palais présidentiel au milieu d'un vide légal et constitutionnel terrifiant», écrit le commentateur politique Hassan Nafea dans le quotidien indépendant al-Masry al-Youm. Outre l'absence de Parlement depuis la dissolution, le pays n'a toujours pas de constitution pour remplacer celle suspendue après le départ de M.Moubarak, laissant les pouvoirs présidentiels dans le flou. Une victoire de M.Chafiq «garantirait à l'armée d'avoir l'un des siens à la tête de l'exécutif, mais lui permettrait aussi d'influencer la mise en place des autres institutions du nouveau régime», estime M.Nafea. Sur le plan sécuritaire, l'armée vient de se faire remettre le droit de procéder à des arrestations de civils, une mesure vivement dénoncée par des organisations de défense des droits civiques qui l'assimilent à une forme de «loi martiale». Plusieurs analystes estiment que cette mesure et la dissolution du Parlement permettront à l'armée de rester maître du jeu quelle que soit l'issue de la présidentielle. Ancien commandant en chef de l'armée de l'air, M.Chafiq, 70 ans, a fait campagne sur le thème de la stabilité, cher à de nombreux Egyptiens après plus d'un an d'une transition politique chaotique. Il est soutenu dans la communauté chrétienne copte, inquiète de la possibilité qu'un islamiste dirige l'Etat. M.Morsi, un ingénieur de 60 ans, a de son côté cherché à gommer son image d'islamiste conservateur pour se présenter comme le seul recours des partisans de la «révolution» contre un retour de l'ancien régime. Ce duel politique a mis dans le désarroi de nombreux électeurs, qui avouent avoir à choisir entre «le moins pire» des deux candidats, ou se réfugier dans l'abstention.