Les responsables marocains et espagnols ne peuvent éviter lors de leurs rencontres la question du Sahara occidental. Les commentaires et les déclarations à ce sujet sont pratiquement inévitables. Ce fut le cas mercredi dernier.«Il serait pertinent que l'émissaire spécial sur le dossier (du Sahara occidental, Ndlr) s'intéresse aux thèmes centraux et non aux thèmes accessoires», a déclaré le chef de la diplomatie espagnole José Manuel. Garcia-Margallo lors d'une conférence de presse qu'il a conjointement animée à Rabat avec son homologue marocain Saâd Eddine Othmani. Une autre manière de dire que le représentant personnel de Ban Ki-moon est sorti de ses prérogatives. Une position sur laquelle s'est adossé le Maroc pour lui signifier son retrait de confiance. «M.Ross s'est éloigné du mandat qui lui a été confié par le secrétaire général de l'ONU en sa qualité de facilitateur et qui consiste à aider les parties à parvenir à une solution politique», avait déclaré Youssef Amrani, ministre délégué marocain aux Affaires étrangères. Madrid abonde dans le même sens et met de l'eau au moulin de Rabat. L'Espagne, dont la responsabilité historique dans le conflit du Sahara n'a pas été assumée, ne se limitera vraisemblablement pas qu'à donner son avis sur ce dernier développement qu'a connu le conflit sahraoui. «Nous avons écouté les explications du Maroc et de M.Ross. Nous sommes en train d'étudier le dossier... Nous voulons une solution stable, pacifique et durable de ce conflit, dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU», a indiqué le ministre espagnol des Affaires étrangères qui avait répondu à une question sur la décision du Maroc de retirer sa confiance à Christopher Ross l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental. Que cache ce soutien, à peine déguisé, à la décision de Rabat? Les Sahraouis, qui ont espéré une autre position du nouveau gouvernement espagnol, au sujet du dossier sahraoui, que celle affichée par leurs prédécesseurs socialistes jugée pro-marocaine, n'ont probablement pas pensé que la crise économique qui a mis K.-O. debout l'Espagne allait interférer sur le conflit du Sahara occidental. La sortie médiatique du patron de la diplomatie espagnole était-elle intéressée? Apparemment oui. La déclaration espagnole s'est faite quelques jours après la signature de gros contrats entre entreprises espagnoles et entreprises publiques marocaines. La visite de José Manuel García-Margallo, a été précédée par les travaux du forum maroco-espagnol des investissements. Plus de 300 entreprises espagnoles tentent d'investir le marché marocain. Cette rencontre a permis à la société espagnole Assigma, d'obtenir un contrat de 87,5 millions d'euros pour la construction de rames pour le projet du TGV qui doit relier Tanger à Casablanca. «Il ne faut pas trop se réjouir des critiques de Margallo à la mission de Christopher Ross et du coup se construire des châteaux en Espagne. Madrid est dans une situation de récession, elle a grandement besoin du Maroc comme de l'Algérie pour la relance de sa machine économique. José Manuel García-Margallo ou un autre responsable du gouvernement fera la même chose: distribuer des déclarations qui caressent le Maroc dans le sens poil pour pouvoir décrocher des contrats», a souligné le président de l'association Sahara marocain, Réda Taoujni, ardent défenseur de la marocanité du Sahara, et directeur de publication du journal Assahra al Ousbouiya. Un avis d'un ardent défenseur de la marocanité du Sahara qui témoigne que politique et économie peuvent faire bon ménage pour la circonstance.