Les services de sécurité auraient agi sur la base d'informations précises fournies par des terroristes récemment faits prisonniers dans la région. Selon des sources locales, l'émir du GIA, Rachid Oukali, alias Abou Tourab, accompagné d'une dizaine de ses acolytes, serait encerclé au niveau du maquis surplombant la ville de Meftah. Cette information contredit, pour ne pas dire complète, celle qui avait circulé à propos de l'arrestation d'un certain émir dénommé Abou Tourab. Il s'agissait, en fait, d'un pseudonyme, comme il s'en produit souvent au niveau des groupes terroristes, ce qui a tendance, parfois, à brouiller les pistes des services de sécurité. A en croire des sources médiatiques, citant elles-mêmes des sources sécuritaires, «un islamiste armé répondant au nom d'Abou Tourab a été effectivement arrêté à Saoula, au domicile des parents de Rachid Oukali. Mais il s'agit d'un émir local de Meftah, qui était chargé d'un ‘‘message'' aux parents de l'émir national du GIA». Comme annoncé dans une précédente édition, l'opération de Meftah s'était soldée la semaine dernière par la mise hors d'état de nuire de quatre terroristes alors que trois autres avaient été faits prisonniers. Les services de sécurité avaient entouré d'un secret absolu ces arrestations. Notre journal avait été le seul à en faire état. Il semble que les enquêteurs craignaient que ces arrestations, passibles de fournir de précieuses informations sur les groupes en train de s'infiltrer dans la région, ne fassent échouer le plan de démantèlement de tout le groupe. Aucune information n'a filtré sur cette opération que l'on dit de grande envergure. Les quelques témoignages recueillis sur place se contentent d'indiquer que «cela risque de durer plusieurs jours», ajoutant que «les éléments encerclés, avec lesquels se trouve assurément Abou Tourab, n'ont aucune chance de briser l'encerclement». Les mêmes sources ajoutent que «la fin quasi officielle du GIA sera scellée avec la mise hors d'état de nuire de cet homme et du groupe qui l'accompagne, constituant le plus gros des troupes du GIA». Il est vrai, en effet, qu'un terroriste arrêté il y a de cela plus d'une année, avait témoigné pour dire que «le GIA ne disposait plus que d'une quarantaine d'éléments peu armés, contraints de fuir les services de sécurité et de piller les vergers des hameaux isolés pour ne pas mourir de faim». Il semble même que la présence de Abou Tourab à Meftah, réputé être un des principaux anciens fiefs de l'AIS, ait répondu à la nécessité qu'auraient éprouvé ces terroristes de trouver un endroit sécurisé pour se redéployer aux portes d'Alger et y préparer des attentats en ce mois de ramadan durant lequel le GIA a pris pour habitude d'ensanglanter la capitale. Depuis son intronisation à la tête du Groupe islamique armé, le 14 février 2002, dans un communiqué placardé dans la région de la Mitidja et cosigné par son officier-juriste, Abou Tourab, de son vrai nom Rachid Ouakali, n'a plus donné signe de vie jusqu'à son apparition, tout aussi mystérieuse, dans la localité de Meftah. A la tête d'un GIA crépusculaire, menant à peine quelque soixante hommes disséminés dans la région de Blida, d'Alger et de Médéa, le nouveau chef du GIA menait une coquille quasi vide et son organisation n'était plus qu'un conglomérat composite de jeunes desperados à l'agonie. Son nom refait surface vers la fin de l'année 2002 avec l'arrestation du «groupe des 16», qui activait dans l'Algérois et qui fut neutralisé grâce aux aveux de Hocine Kobbi, terroriste devenu aveugle suite à l'explosion d'une bombe sur son passage dans un maquis de Chréa. Ce groupe avoue être dirigé par l'émir Abou Tourab. Dès lors, on n'entend plus parler d'Abou Tourab. Pis, l'autre chef du GIA, Farid Bechroul, dit «Khaled el fermache», aurait fait scission et récupéré argent et certains des irréductibles du groupe. Cela mena peu à peu Abou Tourab à n'être plus qu'un nom qui ne fait même pas peur et ses incursions se firent de plus en plus espacées dans le temps et de moins en moins meurtrières. La désagrégation totale du GIA était à l'ordre du jour, d'autant plus que, au centre et l'est du pays, une autre organisation faisait un exceptionnel tapage médiatique, le Gspc. Né le 14 juillet 1974, à Boufarik, Rachid Ouakali dit «Abou Tourab» est le cadet d'une fratrie de trois enfants, tous affiliés au GIA. L'aîné, Djilali, né le 9 octobre 1962 à Boufarik avait activé sous le commandement de Boualem Yahiaoui, des 1992, et fut abattu par les forces de sécurité lors d'un accrochage dans un CEM de Boufarik, le 13 mars 1994. Le benjamin, Ahmed, né le 12 septembre 1978 à Boufarik a rejoint le GIA vers la fin de l'année 1995. Mais c'est Rachid Abou Tourab qui grimpe rapidement les échelons du GIA en faisant partie du groupe de Haouch Grau mené par Antar Zouabri et en participant activement, depuis 1997, à toutes les attaques du GIA à Médéa, à Aïn Defla, à Meliana, à Tipasa et à Blida. De constitution robuste, il était, avant 2002, un des fidèles lieutenants de Zouabri et passait même pour être son bras droit. Sa succession à Zouabri à partir de février 2002 ne se passe pas sans encombre, et plusieurs hommes, dont Farid Becheroul, se séparèrent de lui. La neutralisation d'un chef d'une telle envergure reste encore à vérifier, même s'il est de notoriété que les arrestations de ce genre, soient passées sous silence, afin de permettre aux services spéciaux de passer ces chefs en «exploitation» et d'en tirer le maximum d'informations avant d'en annoncer la capture. Une affaire à suivre, assurément.