La mouvance salafiste s'y est engouffrée dans ce trou de souris en s'attaquant aux symboles occidentaux Les Etats - Unis ont semé les graines de l'extrémisme à travers leur soutien aux révolutions arabes au Maghreb en particulier et en Afrique du Nord en général. De Tunis au Caire en passant par Tripoli, les peuples ont décidé de mettre fin à des régimes qui les ont opprimés pendant des décennies. Les islamistes, actuellement au pouvoir en ont récolté les fruits canalisant des années de frustrations. La mouvance salafiste s'y est engouffrée dans ce trou de souris pour asseoir ou essayer d'imposer des systèmes théocratiques tout en s'attaquant aux symboles occidentaux. Les Américains n'y ont vu que du feu. Ce qui vient de se passer à Benghazi schématise ce type de cliché. Les prétextes sont légion pour s'attaquer aux représentations occidentales. Celui qui attente à la religion musulmane est exploité sans coup férir par les tenants d'un Islam rigoriste, voire radical. Le film intitulé «L'innocence des musulmans», réalisé par Sam Bacile, un Israélo-Américain, a été à l'origine de manifestations en Egypte et en Libye. Il a pris une tournure dramatique à Benghazi. L'attaque contre l'ambassade américaine a été sanglante. 4 fonctionnaires, dont l'ambassadeur, y ont laissé la vie. La violence a été inouïe. Elle a réduit en cendres les locaux de l'ambassade américaine. Le malaise ne se limite pas à des manifestations ponctuelles, inscrites dans le temps. Il est plus profond. «Il ne s'agit que d'un prétexte, d'un élément déclencheur. Si ce film n'avait pas existé, des attaques auraient quand même eu lieu, d'une façon ou d'une autre. Les salafistes cherchent seulement des symboles occidentaux à bannir. C'est l'objectif du mouvement de fond qui est en train de se mettre en place, et c'est d'ailleurs en ce sens qu'il est inquiétant», a déclaré Patrick Haimzadeh, chercheur spécialiste de la Libye. C'est au coeur du fief de la révolution libyenne que les Américains ont été endeuillés. C'est Benghazi qui a servi de base à l'expédition militaire, à laquelle ils ont participé, pilotée par la France sous la bannière de l'Otan, pour se débarrasser de Mouaâmar El Gueddafi, l'ex-guide de la Jamahiriya, qui a régné en maître absolu sur la Libye pendant plus de quarante ans. Un conflit dont les effets collatéraux sont aujourd'hui catastrophiques pour la région. D'énormes stocks d'armes incontrôlés ont permis à la branche maghrébine d'Al Qaîda de se surarmer, de mettre sens dessus-dessous le Sahel et de procéder à un début de partition du Mali. Les pays occidentaux et les Etats-Unis ont semé les graines de l'extrémisme à travers leur soutien aux révolutions arabes au Maghreb en particulier et en Afrique du Nord en général. Une opportunité dont se sont saisie les partis islamistes de ces pays pour accéder au pouvoir alors qu'ils étaient en marge des mouvements de protestation et des révoltes violemment réprimées qui ont fini par emporter les régimes dictatoriaux qui ont régné sans partage pendant des décennies sur les populations et les richesses de ces pays. Les Etats-Unis et les autres puissances occidentales, sous couvert de la démocratie, qui ont pendant longtemps fait ami-ami avec les anciens dictateurs des pays arabes au nom de la défense de la laïcité mais surtout de leurs intérêts avant de leur tourner le dos (Saddam Hussein en Irak contre les Mollahs de Téhéran...) ont favorisé l'émergence de dirigeants islamistes considérés comme plus malléables et coopérant en matière d'affaires et d'intérêts commerciaux. L'équation semble moins simpliste en Libye. «Ces extrémistes salafistes possèdent des armes car ils ont participé à la guerre civile libyenne entre le 15 février et le 23 octobre 2011. Ils sont aussi bien entraînés. L'Etat, l'armée et la police ferment les yeux sur certains événements, de par leurs liens avec des mouvances islamistes» a affirmé Patrick Haimzadeh, diplomate pendant plusieurs années en Libye.