Malgré une organisation horizontale qui exclut de facto toute prise de décision par un petit groupe de personnes, le mouvement citoyen des archs, qui est né dans des circonstances douloureuses pour la région, a tout de même permis l'émergence de leaders charismatiques comme Belaïd Abrika, Ali Gherbi ou Hakim Kacimi, tant il est vrai qu'à l'heure de l'image et de l'audiovisuel, le public a besoin de personnaliser les dirigeants, voire de s'identifier à eux. Le premier dialogue qui avait été initié entre le gouvernement et les archs avait justement cet inconvénient d'avoir été mené avec des personnes peu connues, rapidement taxées de délégués taïwan, enlevant toute crédibilité aux résultats de leur démarche. Du reste, le Chef du gouvernement de l'époque avait eu la sagesse de laisser les choses en l'état. En reprenant à son compte une invitation au dialogue, Ahmed Ouyahia a essayé de désamorcer une crise qui n'a que trop duré et qui a eu pour caractéristique de marginaliser et de pénaliser toute une région centre du pays, la Kabylie pour ne pas la nommer, notamment sur les plans économique et de la création d'emplois. Pour autant, ce nouveau round dialogue ne doit pas du tout être assimilé à une reddition de la part de délégués qui ont su faire preuve de leur esprit de combativité et de sincérité, d'autant plus que les conditions de l'amorce du dialogue ont été discutées en toute transparence dans les différents conclaves de l'interwilayas. Et si des scissions et des divisions sont apparues, cela renseigne au contraire sur le degré de maturité atteint par le mouvement, sur le caractère démocratique des débats et sur l'esprit de responsabilité des différentes tendances. Donc, loin d'aboutir à brader les intérêts du mouvement citoyen, les préalables posés par les conclaves, notamment sur les incidences recensées pour une meilleure application de la plate-forme d'El-Kseur, document de référence. L'autre caractéristique de ce nouveau dialogue qui s'amorce, c'est que le mouvement citoyen est invité à désigner en toute démocratie ses propres délégués, le gouvernement ayant enfin compris qu'il ne peut pas choisir ses interlocuteurs. Pour l'instant, dialogue ne veut pas dire négociation, d'autant plus que la plate-forme d'El-Kseur est, dans l'esprit de ses rédacteurs, scellée et non négociable. La finalité du dialogue vise donc à trouver les meilleurs moyens de mettre en oeuvre la plate-forme d'El-Kseur, pour cesser de marginaliser et de minorer une région et une culture qui comptent dans ce pays, plus de quarante ans après l'indépendance.