Le lever de rideau du Festival national du théâtre professionnel d'Alger s'est fait en grande pompe samedi soir au Théâtre national algérien Mahieddine Bachtarzi. Après la zorna à l'extérieur tout le monde s'est dirigé dans la grande salle flambant neuf pour assister à un petit film retraçant en images les moments forts de l'édition précédente. Mais aussi à Boubchir un montage poético-chorégraphique signé de l'auteur Toufik Ouamane. Beaucoup de monde lors de cette soirée inaugurale où certains n'ont pu trouver de places où s'asseoir. D'ailleurs, le troisième balcon du TNA restait inoccupé en raison de non finition des travaux(pose des chaises). En présence de Kahlida Toumi, reconduite comme ministre de la Culture, le public et les festivaliers ont accueilli sur les planches d'abord la grande comédienne Sonia, invitée cette année comme présidente du jury qui soulignera la richesse du théâtre algérien durant ces 50 dernières année tout en souhaitent encore un meilleur crû pour les cinquantaine années qui vont suivre au 4e art algérien. Après la présentation de l'ensemble du jury, place aux différents hommages rendus notamment à Ibrahim Hachmaoui, Kadour Naimi, Hamid Remas, Gouri Abd El Hamid, et côté étrangers arabes, Fadel Khalil de l'Irak, Kamel Edine Elid d'Egypte, Ghenam Ghenam de la Palestine (résidant en Jordanie) et enfin Azzedine Kanoun de la Tunisie.Moment de pause avant de retourner deux heures plus tard pour entamer les représentations théâtrales en compétition. Et ce fut le burlesque qui ouvrira le bal avec une pièce du Théâtre régional d'Oran, El hacla du metteur en scène Medjahri Habib d'après le texte de Benamara Mahi sur une scénographie bien choisie, moderne aux couleurs bigarrées signée Khaled Hounani. El hacla est une comédie qui retrace les péripéties d'un directeur d'une entreprise publique confrontée à un piquet de grève organisé par le syndicat qui s'oppose fermement à la mise en vente de l'entreprise et la liquidation des salariés. Pour affronter le tohu-bohu dehors et surtout le porte-parole du syndicat alors qu'il est sensé accueillir une délégation d'étrangers qu'il renvoie en attendant, à un hôtel appelé Paradis, il fomente un complot contre cet élément perturbateur et le fait interner à la fin. Aidé par son complice le portier, celui qui ne sait rien, n'a vu, ni entendu. Le directeur fait croire à sa secrétaire qu'il s'est enfermé dans les toilettes. Quand le porte-parole du syndicat des travailleurs arrive, accompagné de journalistes pour le prendre en flagrant délit de cet incident bien saugrenus, le directeur sort du bureau fier et altier et le ridiculise devant ses amis de la presse qu'il prend la peine d'encenser. Il finit par conseiller au poltron concierge d'aller se laver les mains. Parabole facilement dévoilée qui renvoie à la malhonnêteté de cet homme qui s'est ligué avec «l'ordure» de cette entreprise pour réaliser ses sales besognes et régner comme maître absolu. Entre la secrétaire qui découvre son directeur aux toilettes, viendront s'ajouter d'autres personnages dont la femme du directeur, les pompiers très caricaturés ou encore le sous-directeur aux bottes de son chef. Mais si la dérision est ici outrancière parfois, reste que cette pièce contribue à dénoncer par moment en filigrane le laxisme des employés dans l'organisme public. Attrayante, cette pièce peut lasser très vite tant certains gestes ou paroles sont redondants et leur effet risque de vous conduire à l'ennui. Le message aussi paraît par moment moralisateur et tombe dans la pochade d'un microsome humain hallucinant fantasque chahutant bien que rigolo. Certaines tirades inspirées du parler populaire prêtent à sourire, tandis que d'autres plus symboliques et métaphoriques, propres au théâtre algérien dit à tiroir peuvent dérouter. Son sens est à méditer par contre. Mais l'arroseur finit toujours par être arrosé et le stratagème devient réalité. Lever du rideau... La compétition qui réunit 17 troupes de plusieurs régions d'Algérie se poursuivra jusqu'au 27 septembre à raison de deux représentations par jour. Des troupes algériennes et étrangères donneront des représentations en marge de la compétition à Alger ainsi qu'à Tlemcen, Tizi Ouzou, Médéa, Annaba, Maghnia et Koléa. Outre les pièces théâtrales, le Colloque «cinquante ans d'indépendance, cinquante ans de théâtre» abordera la question de l'archivage et la documentation dans le théâtre du 22 au 24 septembre à la salle Atlas (Alger) et réunira des universitaires algériens et étrangers ainsi que des écrivains à l'instar de l'auteur Wassiny Laâredj. Une journée d'étude sera par ailleurs organisée le 20 septembre à la salle El Mougar (Alger) autour de la vie et l'oeuvre de Kateb Yacine. Des ateliers d'écriture et de théâtre sont également prévus, en plus de rencontres littéraires et de spectacles de rue.