Loin des préoccupations des populations de la région, la rencontre a mis à nu l'interdépendance des régimes politiques en place. Ali Lamrabet journaliste franco-marocain con-damné en juin dernier à trois ans de prison ferme et l'avocate et militante tunisienne des droits de l'homme, Radia Nasraoui, en grève de la faim depuis plus de 40 jours peuvent souffrir encore. Le chef de file des Européens à ce sommet des (5+5) de Tunis, le président français, Jacques Chirac, interpellé sur la question des droits de l'homme au Maghreb, par des associations de défense de cet élémentaire droit humain, leur a répondu que ce dernier était respecté en Tunisie et par voie de conséquence ailleurs aussi dans le reste du Maghreb. Pour lui, seul le droit à la consommation leur était garanti. Et encore... Cette logique toute paternaliste et bassement néo-libérale l'a poussé à conclure dès la fin des travaux de cette rencontre au sommet entre les responsables européens et leurs vis-à-vis maghrébins que leurs retrouvailles ont été un «succès indiscutable» et il a souhaité que cette première réunion au sommet «ne reste pas sans suite». Or, aucune date pour un nouveau sommet n'a été fixée par les participants, en dépit de ce que prévoyait le projet de déclaration finale dite «Déclaration de Tunis». Autrement dit, attendu depuis des mois, voire des années, le sommet de Tunis des chefs d'Etat et de gouvernements des ( 5+5 ) s'est terminé hier comme il a commencé : dans l'indifférence totale des populations des dix pays de l'espace euro-méditerranéen pour qui l'évènement, si évènement il y a, ne concernait que les responsables politiques de leurs pays respectifs. Certes, le rituel de la phraséologie habituelle était de la partie. Les dix chefs d'Etat de l'espace euro-maghrébin (Algérie, Maroc, Tunisie, Libye, Mauritanie, France, Espagne, Portugal, Italie, Malte) ont proclamé dans la déclaration finale rendue publique hier qu'ils «condamnent fermement le terrorisme sous toutes ses formes» et décidé de «consolider leur coopération en matière de sécurité en Méditerranée occidentale». Ils ont même déclaré qu'ils appuyaient les initiatives internationales sur ce sujet et notamment «la convocation d'une Conférence internationale sur le terrorisme dans le cadre des Nations unies». S'agissant de la coopération autre que sécuritaire, les dix pays ont appelé au «renforcement des relations des deux rives méditerranéennes pour un partenariat global, solidaire et équilibré, fondé sur les principes de bon voisinage, de respect mutuel et de confiance réciproque». Dans ce cadre, le sommet a souhaité voir l'Union européenne, «accompagner son processus d'élargissement (à l'est du Vieux continent) d'un effort parallèle de soutien en direction des pays de la rive sud du bassin occidental de la Méditerranée.» Et l'instance euro-maghrébine n'a pas omis de rappeler que toute cette coopération entre les deux camps se fera «sur la base du respect des valeurs communes de démocratie, des droits de l'homme et de la consécration de l'Etat de droit». Enfin, les points chauds de l'actualité internationale (Proche-Orient et Irak ) ont été évoqués pendant ces retrouvailles de haut niveau des dirigeants euro-maghrébins en des termes déjà connus de tous les dirigeants qui réitèrent leur appel à une «relance» du premier dossier, «conformément à la légalité internationale», à un «soutien au rétablissement de la souveraineté de l'Irak» avec accélération du transfert du pouvoir aux Irakiens. Ce sont, pour le second les formules solennellement inscrites dans le document final de la rencontre de Tunis. En somme rien de nouveau si ce ne sont ces généralités qui ont fait dire à beaucoup que la montagne a accouché d'une véritable petite souris.