De la France et ses promesses non tenues Apres avoir présenté au Sila son dernier livre Salam Ouessant, l'écrivain français d'origine algérienne et ancien ministre à la Promotion de l'égalité des chances, Azouz Begag sera le 11 octobre prochain, l'invité du Fibda où il présentera dans le cadre du cycle «Bd miroir de l'histoire, une conférence autour du thème de l'humour comme témoin de l'histoire. Rencontré à l'ouverture du Fibda, notre hôte répond à nos trois questions avec un grand sourire et générosité en évoquant avec nous sa BD les leçons coloniales, présente en vente à la libraire du Fibda.. L'expression: Azouz Begag c'est une première pour vous, croit -on, de vous voir ici au Fibda. Vous ne venez pas les mains vides mais pour présenter votre bande dessinée, les leçons coloniales et animer une conférence. Un mot là-dessus... Azouz Begag: En fait j'ai rencontré au salon du livre de Paris au mois de mars dernier l'organisatrice du Fibda, Dalila Nejam à qui j'ai offert mon livre que j'ai réalisé avec mon illustrateur Djlilali Defali qui est de Mostaganem.C'est une bande dessinée qui retrace la pauvre histoire de mon père dans un petit village près de Sétif à partir du 08 mai 1954. c'est une bande dessinée qui est dédiée à tous nos parents et tous nos ancêtres qui surtout dans la région de Sétif, Guelma, Kherata n'ont pas eu accès à l'école de l'égalité des chances que devait nous promettre les Français. Par conséquent j'ai pensé écrire une bande dessinée non agressive, pas belliqueuse, douce sur les ratés des promesses françaises à Sétif en 1945.. Qu'entendez-vous par les promesses françaises? Depuis la révolution française le modèle français était celui de permettre à tous les enfants de France quels que soient leur origine, leur ethnie d'origine, leur sexe, homme ou femme, leur situation sociale d'arriver dans le système éducatif à acquérir des talents et des mérites et c'est cette promesses française de la révolution de 1789 qui a lamentablement échoué dans notre bande dessinée. C'est une bande dessinée qui a aussi comme vocation de raffermir la mémoire sur ce qui s'est passé ici en 1945 parce que mes parents y étaient. Très souvent, ils me racontaient ce qu'ils ont vu et entendu, des canons de l'armée française aux avions qui bombardaient à Sétif, et un peu plus loin sur les contreforts des monts de Béjaïa les deux navires de guerre français qui pendant des jours et des jours bombardaient la nuit et le jour les montagnes de Kabylie pour terroriser les gens. Je crois que c'est important de faire en sorte que cette mémoire soit connue du plus grand nombre, parce que si la mémoire n'est pas là réveillée, elle fait la place au silence. Il n'y a rien de pire que le silence pour étouffer la parole et le principe de la réconciliation je trouve aussi que la bande dessinée, c'est plus accessible aux jeunes. Il y a des couleurs, des images et par conséquent si on veut toucher les jeunes il faut commencer par la bande dessinée, qui elle -même peut donner naissance un peu plus tard à un film. Vous revenez de Tlemcen... Je suis très content d'être aujourd'hui au Fibda arrivant de Tlemcen. Parce que j'y suis parti pour rencontrer mes lecteurs et puis aussi pour sentir les traces de l'émir Abdelkader. Tlemcen me plait, aussi Oued Tafna, et le petit village de l'émir Abdelkader. Car je trouve que cet émir qui était chez nous au 19e siècle, qui a combattu si longtemps les français était un homme de la conciliation entre les chrétiens et les musulmans, a été aussi un homme qui, partout où il allait, à Takademt, sa ville fixe, mais aussi ailleurs, avait une bibliothèque avec lui, au milieu de la smala, c'était un homme érudit qui avait compris que le meilleur moyen de faire en sorte qu'une nation algérienne se crée, qu'une conscience algérienne naisse devait être par le livre. Iqra! c'était le principe pédagogique de l'Emir Abdelkader. J'ai très envie en France en tout cas et en Algérie aussi avec deux bandes dessinées de faire connaître qui était vraiment l'Emir Abdelkader Donc, vous avez le projet d'adapter la vie de l'émir Abdelkader en bande dessinée? Absolument. J'ai déjà commencé depuis deux ans sur ce projet. Les relations de l'émir avec la France sont extrêmement complexes, quotidiennement changeantes qu'il faut donc simplifier, il faut essayer de faire un fiction avec ça. Je souhaiterai aussi, à travers toute l'épopée de l'Emir Abdelkader de faire apparaître le rôle des femmes dans ce qu'est devenu l'émir Abdelkader. Parce qu'on ne le voit pas assez et notamment sa mère lala Zohra. A l'âge de 5 ans, l'émir Abdelkader savait déjà lire et écrire, avec louha, et ce grâce à sa mère. Je pense aussi que l'histoire a retenu peu de chose de sa première femme Kheira Boutaleb qui était sa cousine. Je trouve que c'est injuste et ingrat de ne pas avoir rendu à ces femmes de résistants algériens du 19e siècle, la place qui est la leur dans l'histoire de la formation d'une identité algérienne.